Je me rappelle d'un recours hiérarchique, au début de ma carrière d'avocat fiscaliste, où j'avais dit à l'inspecteur des impôts "vous êtes de mauvaise foi" et il m'avait répliqué : "vous aussi". Il avait un peu raison.
A l'époque, j'étais scandalisé par la mauvaise foi des agents des impôts.
Selon moi, en tant qu'agents de l'Etat, ils se devaient de s'en tenir à une honnête application de la loi et une honnête appréciation des faits.
Maintenant que je suis devenu un vieux con avocat, j'ai réalisé un point important. La vérité nait du débat. Il en va de la procédure fiscale comme de la démocratie, il faut des positions opposées pour arriver à la vérité.
Et il n'y a pas lieu de s'inquiéter sur l'aptitude des agents de l'Etat à avoir une position orientée contre le contribuable. C'est naturel.
Même si je ne suis pas un ancien de l'administration, j'ai dû faire des audits fiscaux et en tant qu'auditeur j'ai revêtu la casquette d'un agent des impôts. A cette occasion, mon objectif était d'avoir quelque chose à dire dans mon rapport d'audit en terme de risque fiscal. Donc l'auditeur fiscal, comme l'agent vérificateur, a une tendance naturelle et inconsciente à rechercher tout ce qui est irrégulier, et cette recherche est naturellement excessive. Un agent chargé du contrôle est naturellement engagé dans une démarche à charge.
Par ailleurs, il faut reconnaître que les services fiscaux sont souvent en position d'infériorité par rapport au contribuable. Il leur appartient de faire la preuve de leur position et, malgré tous leurs moyens d'investigation, ils doivent affronter un contribuable qui a un accès autrement plus direct à la réalité du dossier. Cela peut justifier également une démarche orientée.
Bien entendu, les services fiscaux sont souvent excessifs et ils leur arrivent trop souvent de maintenir des rappels qu'ils savent eux-mêmes illicites. Dans ce cas, le principe de mauvaise foi va trop loin. Les services fiscaux doivent se fixer une limite pour, à l'issue notamment de la procédure contradictoire, limiter les rappels au strict respect de la loi et dans le cadre d'une appréciation raisonnable des faits.
Cela étant, je reconnais aux agents de l'Etat le droit de faire preuve d'un minimum de mauvaise foi en vue de susciter le débat.
Cette position est légitime à condition que les contribuables puissent se défendre efficacement et donc disposent des moyens de faire face à l'enquête à charge des services fiscaux. Donc en pratique, il est vital pour le contribuable de faire appel à un avocat fiscaliste pour se défendre (OK ma conclusion est aussi un peu orientée).