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Location meublée et parahôtellerie

Démêlez les noeuds de la fiscalité
Duvaux Paul

Duvaux Paul

mercredi, 08 mai 2024 08:22

La loi LE MEUR va au Sénat

Après avoir été votée en première lecture par l'Assemblée Nationale, la loi est examinée par le Sénat.

La Commission des affaires économiques a rendu son rapport (avec une version synthétique).

Cette commission a fait un travail sérieux.

Elle propose en particulier de changer le titre de la loi avec une explication très juste :

"Cette proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en janvier, porte l’ambition de remédier aux déséquilibres du marché locatif : or, ses sept articles concernent exclusivement la location meublée touristique, un phénomène dont l’essor peut engendrer des déséquilibres mais qui ne saurait résumer à lui seul les causes profondes de l’attrition du marché locatif

La commission est consciente du phénomène d’éviction du logement locatif permanent auquel font face certaines communes – et notamment des grandes villes – en raison d’un essor de la location meublée touristique, source de revenus complémentaires pour les propriétaires mais qui est longtemps demeurée non-régulée, entraînant un effet d’aubaine pour des investisseurs pour qui les meublés de tourisme sont devenus un placement financier.

Néanmoins, ce phénomène ne doit pas en éluder d’autres qui ont aussi leur rôle à jouer dans les déséquilibres du marché locatif, à l’instar des vacances de logements, de la détérioration de la rentabilité locative ou de la réduction du soutien au logement social (…)

À l’initiative de la rapporteure, la commission a donc adopté un amendement modifiant le titre de la proposition de loi, en cohérence avec son dispositif, qui fait d’elle non pas une proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif mais une proposition de loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale."

En revanche sur le plan fiscal, le texte proposé par le Sénat illustre à la fois sa dépendance au lobby hôtelier et son manque de compétence technique.

Je reprends ci-après en italique le texte du Sénat présentant sa version du volet fiscal de la loi

"Le présent amendement vise à rééquilibrer les régimes fiscaux applicables à la location nue et à la location meublée de tourisme, tout en conservant une incitation au classement pour les loueurs de meublés de tourisme. Il propose de maintenir un régime micro-BIC non pénalisant pour ceux qui y ont recours et simplifie le dispositif fiscal proposé, notamment en supprimant le zonage inopérant prévu par l’article et en s’alignant sur des plafonds existants.

Ainsi, il prévoit d’aligner le taux d’abattement du régime micro-BIC de la location de meublés de tourisme non classés sur le régime micro-foncier de la location nue, à savoir un abattement de 30 % du chiffre d’affaires. Les meublés de tourisme classés bénéficieraient d’un abattement de 50 %, qui permet de prendre en compte les charges supplémentaires du classement pour les propriétaires et de maintenir une incitation significative au classement.

Les hébergements classés seraient alignés sur le régime micro-BIC de droit commun, à savoir, associé à un abattement de 50 %, un plafond d’éligibilité fixé à 77 700 euros de chiffre d’affaires. Le régime dérogatoire dont ils bénéficiaient jusqu’en loi de finances pour 2024, à savoir un abattement de 71 % jusqu’à 188 700 euros de chiffre d’affaires, constituait en effet un avantage fiscal manifestement excessif.

Par ailleurs, l’amendement aligne le plafond du régime micro-BIC des meublés de tourisme non classés sur celui de la location meublée non professionnelle (LMNP), à savoir 23 000 euros de chiffre d’affaires."

Mes commentaires

Les sénateurs méritent le bonnet d'âne fiscal.

Tout d'abord, il est délirant d'aligner le régime micro du meublé sur celui de la location nue.

Rappelons que la location meublée impose de prévoir des meubles, ce qui représente un coût supplémentaire, qui n'existe pas en location nue. Donc il est absurde de reprendre le même abattement que la location nue et rien ne peut le justifier, sauf à faire plaisir au lobby hôtelier.

Et bien entendu, le meublé touristique, classé ou pas, impose de prévoir en plus un service d'accueil et de nettoyage des locaux. Donc le meublé touristique mérite un abattement supérieur à la location nue, et supérieur à la location meublée longue durée.

Cela crée une concurrence fiscale déloyale avec les hôtels, sauf à limiter les charges déductibles des hôtels à 30 % de leur chiffre d'affaires.

Mais le pompon (du bonnet) est pour la fin :

"L’amendement aligne le plafond du régime micro-BIC des meublés de tourisme non classés sur celui de la location meublée non professionnelle (LMNP), à savoir 23 000 euros de chiffre d’affaires."

Donc, le Sénat propose de reprendre comme plafond du régime micro des meublés de tourisme non classés le seuil de 23 K€ qui sert à définir le régime des LMNP.

Cela aboutit à exclure les LMP exploitants de meublé de tourisme non classé du régime micro.

Mais cela aboutit aussi à exclure du régime micro beaucoup de LMNP exploitant de ce type d'activité.

En effet, un LMNP peut très bien dépasser le seuil de 23 K€ sans devenir LMP puisque la qualité de LMP suppose de remplir deux conditions cumulatives : des recettes supérieures à 23 K€ et supérieures aux autres revenus. Je doute fort que les sénateurs aient cette information.

Et enfin, le texte du sénat prévoit que ce nouveau régime s'appliquerait rétroactivement aux revenus de 2024. Donc le projet des sénateurs viole grossièrement la Constitution en imposant aux contribuables concerncés de reconstituer rétroactivement une comptabilité commerciale.

Or s'il s'agit de lutter contre les avantages fiscaux du meublé de tourisme qui le favoriseraient trop, il n'y a aucune raison de se précipiter pour "punir" les exploitants sur 2024, il suffit de prévoir que le nouveau régime prenne effet en 2025, pour espérer les dissuader de faire du meublé de tourisme en 2025.

Attention : tout cela reste un projet et le texte final sera sans doute différent, et notamment sur le plan fiscal.

Dans une récene réponse ministérielle, le ministre annonce que la loi LE MEUR sera examinée au Sénat le 21 mai :

J'ai consulté la nouvelle déclaration des revenus et j'ai pu constater que l'imprimé reprenait bien de facto les abattements d'avant la réforme de la loi de finances 2024 pour les meublés de tourisme non classés en régime micro.

Rappelons que les services fiscaux ont publié une doctrine admettant que les nouveaux seuils et abattements des meublés de tourisme ne s'appliquent pas rétroactivement en 2023 mais seulement en 2024. Mais cela ne plait pas au lobby de l'hôtellerie qui souhaiterait une application rétroactive de l'obligation de relever du régime réel.  Ils en engagé une action devant le CE pour obtenir l'annulation de la doctrine. Ils ont même engagé une action en référé pour obtenir en urgence une suspension de cette tolérance. Le Conseil d'Etat a rejeté cette demande par sa décision du 18 mars 2024 jointe.

Selon moi, la loi ne visait pas à punir les méchants exploitants de tourisme au titre de leur activité réalisées en 2023, qui par hypothèse a déjà eu lieu, mais seulement de lutter contre le surtourisme, pour l'avenir. Donc l'action du lobby est sans lien avec l'objectif prétendument poursuivi.

Cela étant le Consei d'Etat devra se prononcer sur le fond du dossier. Il est très probable que la décision intervienne vers la fin du mois de juin, donc après la période locative, et dans ce ce cas ce sera trop tard. Mais le Conseil d'Etat semble dire le contraire en indiquant une décision à venir dans les prochaines semaines. Suspens !

Compte tenu des évolutions en cours du régime fiscal du meublé (loi LE MEUR sur le micro, réforme annoncée de la fiscalité du logement avec probablement remise en cause des avantages fiscaux du meublé), que faut-il faire en ce début d'année 2024 ?

Comme il est difficile de prévoir ce que sera, en fin d'année, l'état de la réglementation fiscale mais qu'il est légitime d'espérer qu'il n'y aura pas d'effet rétroactif, mon conseil pour l'instant est d'attendre la fin de l'année, et même le début de l'année prochaine, pour définir une nouvelle stratégie fiscale.

Mais ce conseil général comporte des exceptions.

Pour ceux qui font de la location meublée longue durée et qui appliquent le régime micro pour la dernière fois en 2023, il faut sérieusement envisager de passer au régime réel, ou de cesser l'activité de location meublée, en tout cas en direct.

Pour ceux qui font de la location meublée touristique en régime micro, il faut envisager de passer au régime de la parahôtellerie pour conserver ce régime.

Pour ceux qui sont encore LMNP au titre de l'année 2023, il peut être envisagé de faire un retrait d'actif au 31 décembre 2023 (avant le dépôt de la liasse fiscale de l'année 2023).

Dans tous les cas, il faut me consulter car chaque cas est particulier.

Suite à l'avis rendu par le Conseil d'Etat du 5 juillet 2023 (CE avis 8e-3e ch. 5-7-2023 n° 471877 : RJF 10/23 n° 709) , la CAA de DOUAI rend sa décision définitive sur la question des critères à appliquer pour décider de l'assujettissement à TVA d'une résidence de tourisme qui avait prévu des services mais pas tous.

La réforme des seuils du micro des meublés de tourisme mise en place dans la loi de finances pour 2024 ne s'appliquera pas pour les revenus de 2023.

C'est le sens d'une nouvelle doctrine des services fiscaux. Voir au numéro 55 de BOI-BIC-CHAMP-40-20

Cette tolérance administrative fait l'objet d'un recours pour excès de pouvoir de 5 parlementaires. 

jeudi, 22 février 2024 17:31

L'agent des impôts masqué

Un nouveau type d'individu est apparu dans la loi de finances pour 2024 : l'agent des impôts masqué.

vendredi, 16 février 2024 21:36

Le micro rétroactif

La réforme récente du régime micro dans la loi de finances posait un problème car le texte de loi ne prévoyait pas de date d'application.

Donc, faute de précision, la réforme devait s'appliquer dès l'année 2023.

Autrement dit, il aurait fallu que des contribuables dépassant les nouveaux seuils plus réduits reconstituent une comptabilité a postériori pour pouvoir déclarer leurs revenus selon le régime réel.
Le fait d'imposer rétroactivement des nouveaux seuils moins favorables au titre de l'année déjà passée aurait constitué sans doute une irrégularité au plan constitutionnel.

C'est dans ce contexte que les services fiscaux ont publié une doctrine admettant que les contribuables puissent rester au régime micro au titre de l'année 2023 sur la base des seuils en vigueur avant la réforme de la loi de finances.

Par ailleurs, la loi LE MEUR va sans à nouveau modifier les seuils applicables. Ces nouveaux seuils s'appliqueront en principe pour l'année 2024.

Mais l'année 2024 est déjà commencée et, là encore, il n'y aura pas lieu selon moi d'appliquer la loi LE MEUR au titre de 2024, du moins pour les seuils déjà fixés dans la loi de finances pour 2024 et qui seraient encore durcis par la loi LE MEUR. En effet, dans cette situation, il s'agirait d'appliquer un régime rétroactif imposant le réel pour le début de l'année pour des personnes pouvant espérer bénéficier du régime micro à un régime plus favorable. Ce sera sans doute le cas des exploitants de meublé de tourisme classés qui vont perdre le taux de 71 %.

Il serait opportun que la loi LE MEUR prévoit son application sur ce point seulement pour 2025.

L'histoire du micro rétroactif n'est pas encore terminée.

Je cite cette doctrine (BOI-BIC-CHAMP-40-20 n° 55, 14-2-2024) :

"L'article 45 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 modifie les modalités d'application du régime des micro-entreprises pour les activités de location meublée de tourisme. Cet article prévoit notamment, pour les activités de location de locaux meublés de tourisme non classés, la baisse du seuil de chiffre d'affaires d'application du régime des micro-entreprises à 15 000 € et fixe l'abattement représentatif de charges à 30 %. Les dispositions de cet article sont réputées s’appliquer aux revenus de l’année 2023, y compris lorsqu’elles ont pour effet de faire basculer des contribuables du régime des micro-entreprises vers un régime réel d’imposition du fait de la baisse du seuil de chiffre d'affaires d'application du régime des micro-entreprises. Cette modification impose aux contribuables concernés de reconstituer a posteriori une comptabilité commerciale pour l'année 2023. Les contribuables peuvent donc appliquer, dès l’imposition des revenus de l’année 2023, les modifications issues de l’article 45 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024. Toutefois, afin de limiter les conséquences d’une application rétroactive de cette mesure à des opérations déjà réalisées, il est admis que les contribuables puissent continuer à appliquer aux revenus de 2023 les dispositions de l'article 50-0 du CGI, dans leur version antérieure à la publication de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024. Les commentaires présentés au présent I-B § 55 ne tiennent pas compte des modifications apportées au dispositif par l’article 45 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024."

lundi, 12 février 2024 20:52

Formation location meublée 6 juin 2024

Chers amis

J'organise une formation le jeudi 6 juin 2024 sur le régime fiscal de la location meublée et de la parahôtellerie.

C'est une formation d'une journée, de 9 h à 17 h 30, soit 7 heures de formation en présentiel à Paris au Cercle des Armées, avec un nombre maximum de participants de 20 personnes.

Le prix est de 780 € TTC, incluant le repas et un support écrit de 100 pages sous forme d'une présentation.

Cette formation s'adresse en priorité aux experts-comptables, à leurs collaborateurs et aux investisseurs avertis. Il s'agit d'évoquer toutes les difficultés du régime de la location meublée et l'actualité.

A la demande, je peux transmettre le programme détaillé et le bulletin d'inscription à demander par courriel à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..

Je n'ai pas l'agrément qualiopi.

Attention, il n'y en aura pas pour tout le monde !

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