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Location meublée et parahôtellerie

Démêlez les noeuds de la fiscalité
mercredi, 24 juin 2009 15:04

Les résidences hôtelières : note de synthèse sur leur situation

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Le législateur encourage depuis de nombreuses années le développement des résidences hôtelières.

La réglementation fiscale prévoit en effet de nombreuses dispositions permettant leur développement : régime fiscal de la location meublée, régime TVA de la parahôtellerie, etc.

La dernière loi de finances pour 2009, qui est venu réduire et plafonner l'intérêt fiscal des niches fiscales, a largement préservé le secteur des résidences hôtelières en instaurant de nouveaux avantages fiscaux importants (dispositif Scellier et réduction d'impôt de 25 % pour les loueurs en meublé non professionnels).

Les promoteurs et les officines de défiscalisation sont les premiers bénéficiaires de ces dispositifs de faveur.

Ils vendent des appartements aux particuliers en utilisant la défiscalisation comme principal argument de vente.

Les investisseurs achètent un "package" : on leur vend des appartements et ils s'engagent à les louer dès l'achat par bail commercial à un exploitant hôtelier, appartenant généralement au même groupe que le promoteur. Le plus souvent, le package comprend un financement à 100 %.

Mais les investisseurs sont très souvent victimes d'arnaques.

 

L'arnaque de la fausse rentabilité

L'arnaque consiste tout d'abord à vendre très cher les appartements.

Pour simplifier, le prix de vente est généralement 20 à 30 % au-dessus du prix normal.

Dans un premier temps, le fait de vendre nettement au-dessus du prix est bien sûr un énorme avantage pour le vendeur. Il encaisse une marge énorme.

Mais le fait de vendre très cher un bien présente un inconvénient : elle oblige aussi à proposer un loyer à l'investisseur qui est lui-même anormalement élevé.

C'est d'ailleurs le fait de proposer un loyer élevé à l'investisseur, et donc un rendement correct, qui permet d'obtenir l'adhésion de l'investisseur au produit proposé, et de masquer le fait qu'il se fait avoir en achetant un bien trop cher.

Mais ensuite les ennuis commencent pour l'exploitant car il doit verser tous les trimestres des loyers trop élevés aux investisseurs. Les loyers sont trop élevés par rapport aux recettes réalisées dans l'exploitation normale de la résidence.

Très souvent, l'exploitation de la résidence est déficitaire (ou le devient à la moindre difficulté).

Pour faire face à cette difficulté, le promoteur-exploitant affecte une partie de sa marge de vendeur pour combler le déficit de l'exploitation. Il verse une prime à l'exploitant, le "fonds de concours", pour l'aider à combler le déficit des premières années.

Mais tôt ou tard, les fonds de concours sont épuisés et l'exploitant ne peut plus faire face aux pertes d'exploitation. Il fait faillite.

Cette faillite était de toute façon programmée par le promoteur : ce qui compte pour lui c'est d'avoir réalisé ses ventes en toute tranquillité, grâce au fond concours accordé à l'exploitation.

En pratique, les propriétaires sont obligés d'accepter de revoir à la baisse les loyers qu'ils encaissaient.

C'est une catastrophe pour les propriétaires qui avaient bâti un plan de financement sur la base des loyers "garantis" par le promoteur-exploitant. Les loyers deviennent insuffisants pour faire face aux échéances de l'emprunt.

 

L'arnaque des lots de services restant la propriété de l'exploitant

Une deuxième arnaque porte sur les modalités d'achat des appartements.

Lorsque les investisseurs achètent des appartements, il s'agit de lots de copropriété. Ils peuvent croire qu'en achetant leurs lots, ils deviennent également propriétaire des parties communes et plus spécialement des lots de service de la résidence, ceux qui servent à l'exploitation commerciale, comme la salle d'accueil, le bureau, la salle de cafétéria pour servir le petit déjeuner et les autres locaux techniques.

En fait, le plus souvent, ces lots de service restent la propriété du promoteur-exploitant.

Ainsi, en cas de difficulté, les investisseurs se retrouvent dans une situation où il leur est impossible de changer d'exploitant.

L'exploitant en place à l'origine peut facilement leur imposer une baisse de loyer puisqu'il est propriétaire des lots de service.

Cette situation a déjà abouti à de graves spoliations des propriétaires dans plusieurs dossiers.

Dans le dossier d'une résidence se situant dans les alpes, suite à la faillite de l'exploitant d'origine, le juge a ainsi accordé la reprise de l'exploitation à un nouveau gestionnaire. Ce dernier est devenu le propriétaire des lots de service et a imposé aux propriétaires des appartements un nouveau bail avec un loyer dérisoire.

 

Les conséquences désastreuses de la réforme des niches fiscales

Les copropriétaires qui ont acheté des appartements dans les résidences hôtelières sont aussi les victimes de la réforme des niches fiscales imposées par la loi de finances pour 2009.

En effet, cette réforme n'a pas cherché à plafonner les avantages fiscaux de la location meublée professionnelle (LMP) mais elle a eu pour effet de faire perdre presque immédiatement aux investisseurs les avantages du régime LMP et notamment l'imputation des déficits sur le revenu global.

C'est d'autant plus regrettable que, précisément, suite aux difficultés rencontrées par de nombreux exploitants, à la baisse des loyers ou à leur non-versement, de nombreux propriétaires réalisent des déficits d'exploitation.

Par ailleurs la loi de finances a créé deux nouvelles niches fiscales particulièrement attractives : la réduction d'impôt de 25 % pour les investisseurs achetant des appartements meublés (nouveau régime du LMNP) et pour ceux achetant des appartements loués nus à l'exploitant (régime SCELLIER). Ces deux dispositifs sont réservés aux personnes achetant les locaux neufs.

Dans l'ancien régime du LMP, les investisseurs pouvaient avoir intérêt à acheter des locaux anciens.

Mais les nouveaux dispositifs de défiscalisation sont réservés aux locaux neufs.

C'est ainsi que les propriétaires de locaux anciens ont perdu tout espoir de pouvoir revendre leurs appartements à de nouveaux investisseurs.

Par ailleurs, les nouvelles résidences vendues par les promoteurs grâce à ces nouvelles carottes fiscales font directement concurrence aux anciennes résidences dont certaines connaissent pourtant de graves difficultés.

Les risques fiscaux pesant sur les propriétaires acceptant des clauses recettes ou reprenant l'exploitation des résidences

De nombreux propriétaires se trouvent obligés d'accepter une baisse de loyers. Certains exploitants leur proposent de baisser le loyer fixe et de compenser cette baisse par l'octroi d'un loyer supplémentaire déterminé en fonction des résultats ou des recettes de l'exploitation de la résidence.

Mais l'administration fiscale a pris une position selon laquelle l'existence d'un tel intéressement aux résultats de la résidence hôtelière doit aboutir à requalifier l'activité. Les propriétaires des appartements perdent ainsi le régime fiscal de la location meublée et sont considérés comme des exploitants hôteliers.

De même, il semble que l'administration n'accepte pas que des investisseurs se regroupent pour exploiter eux-mêmes leur résidence par l'intermédiaire d'une société constituée à cet effet.

C'est particulièrement regrettable alors que, face aux faillites des exploitants, les propriétaires n'ont souvent pas d'autre choix que de reprendre l'exploitation.

La requalification aboutit à faire perdre les avantages du régime de la location meublée (LMP ou LMNP).

 

La reprise de certaines résidences par des exploitants de logements sociaux

Face à la faillite de nombreuses résidences hôtelières, des exploitants rachètent à bas pris l'exploitation des résidences situées en banlieue parisienne et y développent une activité d'accueil d'urgence de populations sans logement, notamment des squatteurs relogés par la mairie de Paris.

Les propriétaires sont là-aussi victimes d'une arnaque car il leur avait été promis que la résidence devait avoir une affectation hôtelière traditionnelle.

L'utilisation de la résidence pour faire du logement social d'urgence aboutit évidemment à dévaloriser fortement les résidences.

Il est regrettable que les pouvoirs publics participent à la mise en œuvre de cette arnaque.

 

Les actions possibles

Il faudrait lutter contre les abus en mettant en place une réglementation adaptée.

Pour lutter contre la technique des fonds de concours, on pourrait évidemment l'interdire, mais aussi plus généralement rendre obligatoire, pour toute vente à des non professionnels réalisant un placement dépassant un certain seuil, une expertise économique et financière portant sur la rentabilité du placement et son opportunité.

Une telle expertise obligatoire devrait être faite par un tiers indépendant engageant sa responsabilité professionnelle et couvert par une assurance responsabilité civile.

Les copropriétés des résidences hôtelières vendues à des acheteurs non professionnels devraient être obligatoirement propriétaires des lots d'exploitation, autrement dit ces lots devraient être intégrés obligatoirement dans les parties communes.

On pourrait aussi rendre obligatoire, pour toute vente d'un produit de défiscalisation, la présentation à l'acheteur d'un rescrit fiscal réalisé par le vendeur auprès des services fiscaux et validant le schéma au plan fiscal.

Une nouvelle réglementation sur ces questions ne pourrait avoir un effet rétroactif mais, en pratique, elle pourrait servir aux propriétaires d'anciennes résidences pour faire valoir l'arnaque dont ils ont été victimes.

Rappelons que de nombreux exploitants de résidence de tourisme font faillite et que, à cette occasion, les investisseurs se trouvent particulièrement démunis face aux enjeux de la procédure collective. Il faudrait imposer aux juges de la faillite de prendre en compte les intérêts des propriétaires, par exemple en imposant la nomination d'un représentant spécifique de ces propriétaires.

Enfin, les services fiscaux devraient prendre en compte la situation spécifique des résidences en difficulté financière pour admettre, dans certaines limites, l'existence de clause recettes n'entraînant pas la remise en cause du régime fiscal des propriétaires ou encore la reprise de l'exploitation par les des sociétés regroupant les investisseurs.

D'une manière générale, il y a lieu de regretter que le point de vue des investisseurs n'ait pas été pris en compte dans la réforme des niches fiscales.

De même, il y a lieu de regretter que le législateur n'ait pas engagé des réformes pour mettre un terme aux abus des officines de défiscalisation, qui portent préjudice, non seulement aux investisseurs, mais aussi à l'Etat puisque une partie importante du coût de la défiscalisation est détournée à leur profit.

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