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Contrôle fiscal

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samedi, 02 décembre 2017 09:17

Comptes bancaires étrangers non déclarés : quel régime en 2018 ?

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Il y a encore de nombreux résidents fiscaux français qui ont des comptes étrangers non déclarés.

Or ces personnes risquent d'être "prises par la patrouille" dans les prochains mois du fait de la mise en œuvre de l'échange automatique de renseignements.

En principe, toutes les banques du monde doivent inscrire les résidents étrangers qui détiennent des comptes sur des fichiers spéciaux. Ces fichiers devraient être transmis aux autorités fiscales de chacun des pays concernés.

La communication de ces fichiers et leur traitement par les services fiscaux risquent de prendre du temps mais les banques vont progressivement contraindre leurs clients étrangers à régulariser leurs comptes.

C'est déjà le cas pour Israel. Cela devrait être le cas pour tous les pays européens au cours de l'année 2017, et cela devrait toucher les pays asiatiques à la fin de l'année 2018.

Donc en principe, le fisc français devrait bientôt connaître tous ceux qui sont résidents fiscaux français et qui détiennent des comptes à l'étranger non déclarés.

Ils sont nombreux. En effet de nombreuses personnes d'origine étrangère résident en France et ne savent même pas qu'elles sont tenues de déclarer leurs comptes étrangers.

De nombreuses personnes croient par exemple que si elles paient des impôts à l'étranger sur les revenus de ces comptes, elles ne sont pas tenues de les déclarer en France, ce qui est faux.

La question se pose de savoir comment seront traités les gens qui régularisent en 2018.

D'abord à ce jour, les services fiscaux n'ont pas indiqué à quel guichet il faudra s'adresser. Selon moi et sauf mesure contraire des services fiscaux, le seul guichet possible sera le centre des impôts du contribuable.

Ensuite, il y a la question des pénalités.

Ceux qui régularisent en 2018 devront au moins supporter la majoration de 40 % des droits, au lieu de 25 % ou 35 % devant le STDR ; c'est moins favorable.

J'insiste sur le fait qu'il s'agit d'une majoration des droits, c’est-à-dire d'une majoration de l'impôt sur le revenu, de l'ISF ou des droits de succession mais il ne s'agit pas d'un pourcentage du compte.

En pratique, dans certains dossiers, cette majoration est relativement anodine car les droits sont réduits.

Cette majoration n'est pas anodine quand il y a de l'ISF et des droits de donation ou de succession importants.

Remarques sur les sanctions

Les amendes fixes de 1 500 € (pays coopératif) et 10 000 € (pays non coopératif) ne devraient plus s'appliquer. En effet, il a été jugé que ces amendes sont illégales (CAA Versailles 9 février 2017, n° 15VE01689 et 16VEO1215).

A partir de 2018, la loi a supprimé les amendes fixes mais les services fiscaux sont en droit d'appliquer en théorie une nouvelle majoration des droits de 80 % (au lieu de 40 %). Cette majoration ne peut s'appliquer qu'aux rappels de droits portant sur les années postérieures à 2016.

Cette majoration en théorie ne peut être inférieure aux amendes fixes. Selon moi cette façon de faire survivre les amendes fixes au travers de la majoration des droits de 80 % est un grossier détournement de procédure qui devrait être annulée par les tribunaux. Autrement dit, la majoration de 80 % est sans doute légale mais son montant minimum est contestable si les droits omis sont très faibles.

De même, en théorie, il peut s'appliquer des droits de mutation à hauteur de 60 % de la valeur du compte (en prenant le montant la plus élevée depuis 2007), sauf à démontrer l'origine des fonds. Mais selon moi cette majoration n'est pas constitutionnelle, notamment parce qu'elle impose un régime de preuve particulièrement excessif.

Régime des comptes déclarés ou découverts à compter de 2018

Il faut selon distinguer l'importance des comptes.

Pour les petits comptes inférieurs à 50 K€ appartenant à des personnes non assujetties à l'ISF, la régularisation devrait rester anodine. Il faudrait juste refaire les trois dernières déclarations de revenus si les comptes ont procuré des revenus. Selon moi, il est possible de refuser d'appliquer l'amende fixe.

En pratique, pour ces petits comptes, il est inutile selon moi de faire autre chose que de les déclarer dans la déclaration des revenus 2017 à faire au début 2018, tant les enjeux sont faibles.

Pour les comptes plus importants et surtout pour ceux qui sont assujettis à l'ISF, la régularisation du compte, volontaire ou forcée, risque de coûter plus cher. Il faut régulariser les déclarations de revenus depuis 2008 ou 2009 mais surtout il faut régulariser l'ISF depuis 2008. Les droits dus seront nécessairement majorés de 40 % pour les années 2008 à 2016. Les droits dus sur l'année 2017 seront majoréss de 80 %.

Pour ces comptes, il faut déposer un dossier de régularisation auprès de son centre des impôts avec impérativement l'aide d'un avocat fiscaliste (comme moi).

Pour les comptes très importants, supérieurs à plusieurs millions, il existe un risque de sanctions pénales. Plus les comptes sont importants, plus il sera difficile d'éviter également l'application des droits de mutation égaux à 60 % du compte. Il est possible de redouter que, pour les très gros comptes, les contribuables seront contraints de régulariser aux conditions imposées par l'administration, pour éviter les poursuites pénales. Mais ce risque n'existe pas selon moi pour les petits comptes.

Pour ces gros comptes, il est encore temps de régualiriser le plus vite possible pour éviter d'être pris par la patrouille et pour éviter les poursuites pénales.

Conclusion

Le coût d'une régularisation spontanée reste généralement selon moi relativement peu élevé et je conseille à tous les retardataires de le faire.

L'option consistant à ne rien faire et attendre la suite ne me paraît pas raisonnable.

Il ne peut en effet être exclu une approche très agressive des agents des impôts en cas de compte important révélé par les fichiers des banques. 

La révélation du compte a aussi le gros avantage de permettre le transfert des fonds, officiel et immédiat.

Mise à jour au 28 février 2019 : attention au fait que la décision du CAA de Versailles du 5 février 2017 a été annulée par le Conseil d'Etat (décision du 12 juillet 2018) depuis la rédaction de cette note. Cela dit, il demeure des arguments pour s'opposer à l'application des pénalités fixes de 1 500 € par compte quand elles sont manifestement disproportionnées par rapport aux omissions fiscales, réelles ou potentielles.

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