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Défiscalisation

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jeudi, 17 mars 2011 12:19

Les banques tenues d'une obligation d'information en matière d'assurance-vie

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Il n'est pas toujours facile d'attaquer les banques sur des fautes commises au moment de la vente de placement type assurance-vie.

En général la banque fait valoir qu'elle n'avait aucune obligation de mise en garde, laquelle est réservée aux placements "spéculatifs", c'est-à-dire particulièrement dangereux, et qu'elle ne s'applique pas aux simples placements boursiers.

La banque fait souvent valoir que son client était un professionnel des placements financier et donc un client averti, pour lequel il n'existe aucune obligation d'information ou de mise en garde.

De plus, la banque se retranche ensuite derrière le fait qu'elle a transmis à son client une note d'information qui suffisait d'après elle à informer des risques encourus.

En fait en pratique, ces notes d'information sont souvent incomplètes, notamment parce qu'elles ne comportent pas la mention selon laquelle il existe un risque de perte en capital.

C'est ainsi que la cour de cassation vient d'annuler une décision de Cour d'appel qui avait rejeté la responsabilité de la banque "sans rechercher si la banque n'avait pas manqué à son devoir d'information en s'abstenant de mentionner les caractéristiques les moins favorables et les risques inhérents aux options qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés."

L'arrêt est intéressant notamment parce que la banque avait présenté un document "non contractuel" promettant un rendement d'au moins 4 %.

C'est ainsi que même un document publicitaire "non contractuel" peut influencer une décision de justice lorsqu'il tient lieu d'information du client dans un cas où il existe une obligation d'information.

 

Je cite la décision (Cass com 8 mars 2011 n° 10-14456) :

"Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, M. X... a souscrit le 12 décembre 2000 auprès de la Société générale (la banque), pour la somme de 304 898,03 euros et pour une durée minimale de huit années, un contrat collectif d'assurance sur la vie à adhésion facultative; qu'il a choisi le support «Sequoia Equilibre», constitué d'unités de compte investies en parts d'organismes de placements collectifs en valeurs mobilières (OPCVM), après avoir reçu, le 14 novembre 2000, une note d'information visée par la Commission des opérations de bourse, accompagnée d'une simulation personnalisée faisant apparaître un rendement annuel minimum de 4 % et maximum de 10 % de l'investissement proposé ; qu'ayant constaté en février 2007, la perte de valeur du capital investi et reprochant à la banque de ne pas l'avoir mis en garde, lors de la souscription du contrat, sur le risque d'un rendement négatif du placement proposé, M. X... a recherché sa responsabilité ;

Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches :

Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il a constaté un manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil, alors, selon le moyen :

1°/ que le banquier qui concourt à la réalisation d'une opération financière doit délivrer à son client des conseils adaptés à sa situation personnelle ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la banque n'avait pas manqué à son devoir de conseil en proposant à son client, qui entendait à l'âge de 62 ans, se constituer un complément de retraite, un produit comportant des risques élevés de fluctuation de la valeur de l'épargne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

2°/ que ne peut être regardé comme un client averti, en matière boursière, que le client qui pratique habituellement des opérations de bourse de telle sorte qu'il en maîtrise les mécanismes ; qu'en retenant que M. X..., qui avait été gérant d'une société de maçonnerie et était totalement profane en matière de fluctuations d'OPCVM, devait être regardé comme un client averti du seul fait qu'il avait été «chef d'entreprise», la cour d'appel s'est prononcé par des motifs impropres à justifier sa décision et a privé une nouvelle fois sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que dans ses conclusions d'appel, M. X... se bornait à reprocher à la banque, au titre d'un manquement à son devoir de conseil, la remise de simulations reposant sur des
hypothèses de rendement uniquement positives ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est pas recevable ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que les produits proposés étaient constitués par des OPCVM soumis aux fluctuations du marché boursier, faisant ainsi ressortir que, les opérations en cause ne présentant pas un caractère spéculatif, la banque n'était pas tenue envers M. X... d'une obligation de mise en garde, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu que pour infirmer le jugement en ce qu'il a constaté un manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil, l'arrêt retient que M. X... lui reproche en vain de ne pas l'avoir mis en garde, lors de la souscription du contrat, sur le risque de rendement négatif en lui présentant des simulations qui font apparaître un rendement minimum de 4 % et maximum de 10 %, qu'en effet, d'une part, il est rappelé sur le document présentant les simulations de rendement, que cette proposition, réalisée sur la base d'hypothèses, ne peut être considérée comme un document contractuel, d'autre part, les caractéristiques du placement et les conditions et aléas de son placement sont parfaitement décrits sur la note d'information remise, mentionnant que les supports constitués sous forme d'OPCVM comportent des aléas en fonction des fluctuations des marchés financiers ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la banque n'avait pas manqué à son devoir d'information en s'abstenant de mentionner les caractéristiques les moins favorables et les risques inhérents aux options qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la Société générale aux dépens ;"

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