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Gestion fiscale du patrimoine privé

Démêlez les noeuds de la fiscalité
samedi, 26 février 2011 13:51

Les honoraires de l'avocat sont-ils déductibles?

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Le client de l'avocat peut-il déduire les honoraires de l'avocat et récupérer la TVA grevant ces honoraires ?

Voilà une question importante pour les avocats et leurs clients.

Il faut distinguer selon les types de revenu.

 

Les revenus professionnels (agricoles, commerciaux et des professions libérales)

Lorsque les clients sont des entreprises, les honoraires peuvent être déduits des résultats, sous réserve bien entendu que les prestations de l'avocat se rapportent à l'activité de l'entreprise.

Les honoraires d'avocats versés à l'occasion du procès peuvent être compris parmi les charges déductibles (D. adm. 4 C-622 n° 6, 30 octobre 1997).

C'est parce que les frais d'avocats sont utiles à l'activité professionnelle que cette déduction est possible.

Si une société assujettie à l'impôt sur les sociétés paie les honoraires d'une prestation d'avocat ne bénéficiant en fait qu'à son dirigeant, c'est un acte anormal de gestion (et accessoirement un abus de bien social). La société risque un rappel d'impôt sur les sociétés et de TVA et le dirigeant un rappel pour distribution occulte, le tout majoré d'une pénalité de 40 %.

Un avocat ne doit pas facturer à une société une prestation qui profite en fait à ses dirigeants, sauf à se faire complice d'un abus de bien social. En pratique, ce principe n'est pas toujours facile à respecter.

 

Revenus salariés

S'agissant des salariés, il est prévu la posssibilité de déduire les frais engagés pour l'obtention du revenu à l'article 83 du CGI en optant pour les frais réels (et donc corrélativement de perdre la déduction de 10 %).

Cette option pour les frais réels ne s'applique qu'aux salariés et en concerne pas selon moi les pensions.

Les tribunaux retiennent parfois une définition restrictive de la notion de dépenses effectuées en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un revenu.

C'est ainsi qu'il a été jugé qu'un salarié qui expose des frais d'avocat pour l'assister dans la négociation de sa rémunération avec son nouvel employeur, ne peut être regardé comme ayant engagé des frais inhérents à l'emploi au sens des dispositions de l'article 83, 3° du CGI. (TA Paris 12 juillet 2010 n° 07-2110, 2e sect., 2e ch., Le Roy : RJF 1/11 n° 39).

Cela me paraît particulièrement discutable.

Il a été admis que les frais de procès, et notamment les honoraires versés à un avocat, engagés par un salarié dans le cadre de procédures prud'homales constituent des frais professionnels déductibles

(Rép. Dhaille : AN 6 juillet 1998 p. 3752 n° 10405 ; Inst. 30 décembre 1998, 5 F-1-99 n° 89 ; D. adm. 5 F-2543 n° 18, 10 février 1999).

Mais si l'indemnité reçue par la procédure n'est pas imposable, les frais d'avocat ne devraient pas être considérés comme déductibles (D. adm. 5 F-2512 n° 9, 10 février 1999).

Et si l'indemnité reçue est partiellement taxable, faut-il déduire les honoraires au prorata ? La question peut se poser.

Tous les honoraires versés à un avocat et liés à l'activité salarié ne sont pas nécessairement déductibles, notamment parce qu'il peut être considéré que ces frais d'avocat ne sont pas engagés en vue de l'acquisition et la conservation du revenu. Par exemple, les honoraires d'un avocat fiscaliste conseillant son client sur le régime fiscal de la rémunération reçue risquent d'être considérés comme non déductibles.

De toute façon, en pratique, la plupart des salariés ne renoncent pas à la déduction forfaitaire de 10 % qui reste plus avantageuse que la déduction des frais réels.

 

Les revenus fonciers

Le régime des revenus fonciers est celui des revenus de location d'immeubles loués nus.

L'article 31, I-1° -e du CGI prévoit la déduction notamment pour :

- les frais de rémunération, honoraire et commission versés à un tiers pour la gestion des immeubles.

- les frais de procédure.

Dans la catégorie des frais de gestion, l'administration a expressément admis la déduction des honoraires versés à un tiers pour la rédaction de déclarations fiscales (inst. 23 mars 2007, 5 D-2-07 fiche 7 n° 8).

L'avocat fiscaliste qui aide un particulier à établir sa déclaration de revenus fonciers peut donc émettre une facture déductible. La déduction ne peut intervenir qu'au titre des revenus fonciers de l'année du paiement, donc l'année suivant celle de la déclaration pour lequel l'avocat intervient.

Par ailleurs, en cas de procédure, les honoraires de l'avocat sont déductibles.

Il me paraît possible aussi de considérer que sont déductible les honoraires relatifs à une consultation juridique ou fiscale portant sur la gestion locative au sens large.

En revanche, ne sont pas déductibles selon moi les honoraires relatifs à des conseils généraux sur la gestion du patrimoine qui se rapportent à des points sans lien avec la location, par exemple sur les objectifs de transmission.

 

Les revenus mobiliers

Les revenus mobiliers sont les revenus provenant de placements financiers.

Dans cette catégorie, il est possible de déduire les dépenses effectuées pour l'acquisition et la conservation du revenu.

En pratique, les frais déduits à ce titre sont surtout constitués par les frais de garde facturés par les banques.

Il ne fait pas de doute que des frais de procédures engagées pour obtenir le paiement des revenus mobiliers sont des charges déductibles. Ainsi un associé privé à tort de ses dividendes peut déduire les honoraires dus à un avocat engagé pour en obtenir le paiement.

Il paraît aussi possible de déduire les honoraires de l'avocat fiscaliste qui intervient pour préparer la déclaration de ces revenus mais ce point n'a jamais été jugé et risque de susciter l'opposition des services fiscaux peu habitués à ce type de déduction.

 

La TVA

La TVA grevant les honoraires de l'avocat est récupérable lorsque la prestation de l'avocat sert à une activité assujettie à TVA.

En pratique, cela peut poser des problèmes pour les entreprises dont l'activité est seulement assujettie partiellement à la TVA, mais cette question, d'une complexité délirante, ne peut être traitée dans le cadre de cette note.

 

Les plus-values des particuliers

En matière de plus-value immobilières, les honoraires de l'avocat qui est intervenu pour permettre de la vente ne sont pas prévus comme des charges déductible de la plus-value pour le vendeur.

En revanche, les frais d'acquisition peuvent être intégrés dans le prix d'acquisition et les honoraires versés au rédacteur d'acte peuvent être pris en compte, sous réserve toutefois que le vendeur n'opte pas pour un calcul forfaitaire des frais d'acquisition (7,5 % du prix d'achat).

Pour les plus-values sur titres, il est possible de tenir compte des honoraires de l'avocat rédacteur d'acte dans les frais d'achat.

De même les honoraires du rédacteur d'acte payés par le vendeur peuvent venir en déduction de la plus-value.

Mais les honoraires relatifs à des études générales ne sont pas déductibles.

Ne peuvent être déduits les frais qui ne sont pas directement liés à la vente réalisée. Tel est le cas notamment des dépenses afférentes à une étude juridique ou fiscale (D. adm. 5 B-624 n° 3, 1er août 2001).

 

La discrimination entre les particuliers et les entreprises

Certains ont invoqué l'existence d'une discrimination dont seraient victimes les particuliers par rapport aux entreprises.

En effet, les entreprises qui utilisent les services d'un avocat peuvent déduire les honoraires de leurs résultats imposables et récupérer la TVA alors que les particuliers ne peuvent rien déduire ni récupérer la TVA.

Par exemple, un consommateur qui attaque une entreprise doit payer les honoraires de son avocat sans les déduire de ses revenus et sans récupérer la TVA, au contraire d'une entreprise.

Ne s'agit-il pas d'une atteinte aux droits de la défense et au droit à un procès équitable, principes fondamentaux protégés par notre constitution ?

La question n'a pas été jugée sérieuse par le Conseil d'Etat (9 juillet 2010 n° 339398, 8e et 3e s.-s., Momont : RJF 11/10 n° 1080).

Effectivement, la question présentait un caractère fantaisiste.

Les particuliers ont certes un besoin vital de se loger, de se nourrir, de se chauffer. Toutes ces dépenses sont au moins aussi importantes que les frais d'avocat. Pour autant, elles ne sont pas déductibles de l'impôt sur le revenu et la TVA grevant ces dépenses n'est pas récupérable.

S'agissant de l'impôt sur le revenu, les particuliers sont taxés sur tous leurs revenus sans pouvoir déduire les dépenses de leur train de vie sinon c'est le principe même de l'impôt sur le revenu des particuliers qui serait mis en cause.

Cela dit, comme on l'a vu, les dépenses d'avocat nécessaires pour obtenir un revenu sont généralement déductibles au niveau de la détermination de ce revenu. De la même manière, les entreprises ne peuvent déduire les frais d'avocat que s'il s'agit de dépenses engagées dans le cadre de leur activité lucrative pour rechercher à obtenir de nouveaux revenus.

Les particuliers supportent la TVA parce que la TVA est un impôt sur la consommation des particuliers et non un impôt pesant sur les entreprises (qui en supportent d'autres). Il serait donc délirant d'admettre que les particuliers puissent récupérer la TVA grevant les frais d'avocat lorsque les prestations d'avocat portent sur des actions de leur vie privée sans caractère professionnel.

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