theme1

Location meublée et parahôtellerie

Démêlez les noeuds de la fiscalité
mercredi, 08 mai 2019 16:49

Le couple et la location meublée

Évaluer cet élément
(29 Votes)

Dans cette note je propose d'étudier les effets de la vie de couple sur l'activité de loueur en meublé.

La vie de couple, ce n'est pas toujours simple, même en fiscalité.

 

Le patrimoine du couple, entre communauté et indivision

Il y a un grand nombre de situations patrimoniales dans les couples.

Les couples peuvent être des concubins, des pacsés ou des mariés.

Sans entrer dans le détail de tous ces régimes, il est possible de résumer la diversité des situations en deux cas : soit l'immeuble n'appartient qu'à un seul membre du couple, soit l'immeuble appartient en indivision aux deux membres du couple.

En cas d'indivision, l'immeuble appartient aux deux membres du couple dans une proportion qui n'est pas nécessairement égalitaire.

Le régime de l'indivision peut être plus ou moins organisé, notamment dans le cadre du pacs ou d'un régime matrimonial.

 

Le couple au plan fiscal

Dans certains cas, le fisc considère chaque conjoint comme une unité fiscale séparée.

Mais, dans d'autres cas, le couple est considéré lui-même comme une unité fiscale propre.

En matière d'impôt sur le revenu, les concubins sont des êtres fiscaux nécessairement séparés, alors que les pacsés et les mariés forment un seul foyer fiscal.

En matière d'impôt sur la fortune immobilière (IFI), les membres du couple forment toujours un foyer fiscal, même s'ils sont concubins.

Mais, même quand la notion de foyer fiscal s'applique pour les pacsés et les mariés, cela n'empêche pas d'avoir parfois un régime fiscal individualisé.

En particulier, chaque membre du couple est une source individuelle de revenus. Le foyer fiscal n'est pas une société. Les revenus du foyer ont nécessairement une source individuelle. C'est la somme des revenus de chacun des membres du couple qui est traitée de façon unitaire au sein du foyer fiscal.

La déclaration de revenus comprend souvent deux cases par type de revenus pour séparer les revenus de chaque conjoint. Ce n'est pas le cas des revenus fonciers et des revenus de capitaux mobiliers mais c'est le cas pour les revenus professionnels, et notamment pour les revenus d'entreprise.

Dans la déclaration 2042 C PRO qui sert à déclarer les revenus de location meublée, il y a à chaque fois le choix entre la colonne "déclarant 1" et la colonne "déclarant 2" ce qui correspond à chaque conjoint. Notez au passage que le fisc a depuis longtemps intégré une forme de neutralité sexuelle.

 

L'exercice professionnel est individuel

L'activité professionnelle est en principe individuelle. Donc si un conjoint exerce une activité de location meublée, c'est en principe à titre individuel. Il doit déclarer son activité en remplissant un formulaire de début d'activité de type P0 ou P0i.

Mais il est possible d'exploiter une activité en indivision. Donc deux conjoints qui sont en indivision sur un bien peuvent se déclarer en indivision et faire une seule déclaration professionnelle.

 

La distinction entre exploitant de l'entreprise et propriétaire de l'immeuble

L'exploitant individuel de location meublée n'est pas nécessairement le propriétaire de l'immeuble utilisé pour l'exploitation.

L'immeuble exploité peut être la propriété indivise du couple ou même la propriété exclusive du conjoint non exploitant.

Il est possible de concevoir qu'un conjoint loue le bien dont il a la propriété à l'autre conjoint.

En général, si un conjoint exploite en meublé un immeuble détenu par l'autre conjoint, il s'opère de facto un prêt de l'immeuble d'un conjoint au profit de l'autre. Une telle opération de mise à disposition gratuite (prêt) est en théorie exonérée d'impôt, mais seulement s'il s'agit d'un logement, en application de l'article 15, II du CGI. En pratique, les prêts d'immeuble autre que les logements ne sont jamais taxés par les services fiscaux.

Mais en principe pour mettre un bien à son actif et pour avoir le droit de l'amortir, il faut en être propriétaire.

Donc, selon moi, il n'est pas possible pour un conjoint de mettre à l'actif de son entreprise un bien qui appartient exclusivement à l'autre conjoint. Cela me semble en revanche possible s'il en détient une partie de la propriété, en cas d'indivision conjugale légale.

 

L'exploitation en commun d'une entreprise de meublé

Un couple peut exploiter une entreprise en commun et c'est bien sûr le cas d'une entreprise de location meublée.

L'exploitation est en indivision. Dans cette situation il faut considérer qu'il existe une société crée de fait entre les deux conjoints. Il est d'ailleurs alors préférable de rédiger un contrat de société en participation.

Le formulaire à utiliser est le F CMB

Mais il faut bien distinguer cette possible indivision dans l'exploitation de l'éventuelle propriété indivise de l'immeuble. Les deux sujets sont distincts.

Ce n'est pas parce que deux personnes sont en indivision sur un immeuble qu'elles sont tenues de l'exploiter en indivision.

En pratique ce schéma d'exploitation en commun officielle est peu judicieux car il interdit d'opter pour le régime micro.

En effet, le régime micro est réservé aux exploitants individuels et interdits pour les sociétés. Or les couples qui exploitent en commun une entreprise sont considérés comme exploitant en société.

Mais selon moi, en dehors du cas de l'indivision conjugale, et si le régime réel est plus favorable que le micro, il faut choisir le mode d'exploitation en indivision pour se garantir le droit d'amortir la totalité de l'immeuble.

Dans le cas où le régime micro est plus avantageux, il ne faut pas se déclarer en indivision d'exploitation. Un seul des conjoints se déclare comme exploitant en régime micro. En effet, en régime micro, il importe peu de savoir qui est propriétaire du bien exploité.

 

L'exploitation d'une entreprise distincte de location meublée par conjoint

La question est de savoir s'il est possible que l'activité de location meublée du couple soit divisée entre les deux conjoints, de telle sorte que chaque conjoint soit un exploitant différent.

Cela peut présenter un intérêt pour certains seuils de chiffre d'affaires : micro, franchise de TVA et exonération de plus-value selon l'article 151 septies.

S'il y a deux exploitants par exemple, je pourrais essayer de prétendre que chacun réalise un chiffre d'affaires de 60 K€ de telle sorte que chacun pourra demander le régime micro limité à 70 K€ alors que globalement le chiffre d'affaires dépasse évidemment ce seuil.

S'il y a deux entreprises distinctes, il est possible de faire jouer deux seuils différents mais si c'est la même entreprise il faut globaliser les chiffres d'affaires pour apprécier si les seuils sont dépassés.

Sur cette question, l'administration a indiqué :

"Lorsque deux ou plusieurs membres d'une même famille imposés à l'impôt sur le revenu sous une cote unique exploitent des entreprises distinctes, il convient de considérer isolément la situation de chacun des membres de la famille. Toutefois, cette tolérance ne saurait trouver son application lorsque le contribuable ou un membre de sa famille exploite lui-même différentes entreprises.
La question de savoir si les fonds exploités par deux époux constituent ou non des entreprises distinctes doit être appréciée sans qu'il soit besoin de retenir comme élément déterminant d'appréciation le régime matrimonial des intéressés mais essentiellement en fonction des données de fait : magasins séparés, baux distincts, comptabilités propres, immatriculation personnelle de chacun des époux au registre du commerce ou au répertoire des métiers (Rép. Buron : AN 19-11-1977 p. 7791 n° 32861)."

Si deux conjoints exercent chacun une activité de location meublée, il sera difficile de prétendre qu'il s'agit de deux entreprises différentes, sauf si certaines circonstances de fait peuvent démontrer l'existence de deux entreprises distinctes, notamment clientèle différente, locaux distincts, moyens distincts, implication personnelle incontestable de chacun des conjoints dans son entreprise.

 

Les seuils de la distinction entre LMP et LMNP

Les seuils visés à l'article 155 IV du CGI et qui définissent le régime du LMP s'apprécient nécessairement au niveau du foyer fiscal. Il faut globaliser les chiffres au niveau du foyer.

C'est ainsi que, si chaque conjoint exerce une activité distincte de location meublée, ils relèvent nécessairement tous les deux du même régime fiscal, LMP ou LMNP. Il n'est pas possible dans un même foyer fiscal d'avoir un LMP et un LMNP.

 

Le divorce et le décès de l'un des conjoints

Si l'activité est transmise d'un époux à l'autre, il faut constater la cessation d'activité de l'époux qui arrête son activité et la taxation des plus-values latentes. C'est le cas, même si l'époux qui reprend l'activité était déjà propriétaire des immeubles mis en location par son conjoint divorcé ou décédé.

Si le conjoint qui décède ou qui divorce n'était pas l'exploitant mais seulement le propriétaire des immeubles utilisés, il s'opère un transfert de la propriété des immeubles. Mais selon moi, un tel transfert n'est pas un motif de taxation de la plus-value, en l'absence de cessation d'activité ou de retrait d'actif.

Le décès de l'exploitant LMP entraîne en principe la cessation d'activité de l'entreprise et la taxation de la plus-value latente, sachant qu'en régime LMNP, les mutations à titre gratuit ne sont pas imposables.

La reprise de l'activité par un des héritiers peut, dans certains cas, bénéficier de l'exonération prévue à l'article 41 du CGI, ce qui implique la continuation personnelle de l'activité pendant 5 ans par un des héritiers.

Par ailleurs, la succession peut aboutir à un démembrement et au transfert de la nue-propriété de l'immeuble aux enfants. Dans ce cas, cela peut faire perdre à l'exploitant de droit d'amortir l'immeuble. En pratique, si l'exploitation continue, il faut que les héritiers apportent leurs droits dans une société en participation ou une SARL de famille. Un tel apport en société est compatible avec le régime de l'article 41 du CGI.

 

L'IFI et le couple

En matière d'IFI, tous les couples sont des foyers fiscaux, même les concubins.

Il est prévu une exonération des biens professionnels qui peut profiter aux loueurs en meublé.

Je rappelle que l'exonération des biens professionnels en IFI est sans rapport avec le statut de LMP au sens de l'impôt sur le revenu. Autrement dit le mot professionnel n'a pas le même sens en impôt sur le revenu qu'en IFI. Dans le monde merveilleux de la fiscalité, chaque mot peut avoir un sens différent selon le contexte.

L'exonération IFI suppose de remplir deux conditions de seuils (plus de 23 K€ de recettes mais aussi un revenu net supérieur aux autres revenus professionnels) et, selon l'administration, une condition d'exercice professionnel principal.

Les conditions de seuil s'apprécient de façon globale au niveau du foyer.

La condition d'exercice professionnel principal s'apprécie en revanche de façon individuelle : il faut que l'exploitant de l'activité y consacre l'essentiel de son temps de travail et peu importe qui est propriétaire de l'immeuble.

Si ma femme exploite une activité professionnelle principale de location meublée ou de parahôtellerie, le foyer peut être exonéré d'IFI à raison des immeubles servant à l'exploitation, même si les immeubles m'appartiennent en biens propres.

 

Conclusion

La vie de couple n'est pas simple en fiscalité mais elle donne beaucoup de possibilités d'optimisations fructueuses.

Ils se marièrent et ils eurent beaucoup de schémas fiscaux.

Lu 118475 fois

248 Commentaires

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul vendredi, 21 octobre 2022 11:34 Posté par Duvaux Paul

    Réponse à Delaporte : je ne comprends pas bien votre question alors que vous commencez par citer la réponse déjà faite à votre question : "Mais selon moi, en dehors du cas de l'indivision conjugale, et si le régime réel est plus favorable que le micro, il faut choisir le mode d'exploitation en indivision pour se garantir le droit d'amortir la totalité de l'immeuble" Une réponse sérieuse suppose une consultation.

  • Lien vers le commentaire DELAPORTE jeudi, 20 octobre 2022 17:20 Posté par DELAPORTE

    Cher Maître, merci pour cet article très intéressant.
    Petite précision : vous indiquez dans votre article "Mais selon moi, en dehors du cas de l'indivision conjugale, et si le régime réel est plus favorable que le micro, il faut choisir le mode d'exploitation en indivision pour se garantir le droit d'amortir la totalité de l'immeuble". Qu'en est-il pour un couple marié sous le régime de la communauté ou en séparation de biens (donc en indivision conjugale) dont un seul des membres du foyer fiscal exploite en entreprise individuelle le bien acquis à 50/50 ? Y a-t-il remise en cause par l'administration fiscale du droit à déduction de l'amortissement de la QP appartenant au conjoint non exploitant ? donc peut-on amortir 100% du bien ou seulement 50% du bien ? Merci beaucoup, très cordialement. Ronan

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul vendredi, 14 octobre 2022 20:07 Posté par Duvaux Paul

    réponse à Pia : une réponse sérieuse suppose l'étude de votre cas. Mais il ne faut pas faire de schéma basé sur une location à soi-même car cela n'a aucun intérêt. La location meublée cela suppose de louer à des tiers.

  • Lien vers le commentaire Pia vendredi, 14 octobre 2022 00:11 Posté par Pia

    Bonjour,

    Je ne sais pas si vous avez déjà eu ce genre de cas.

    J'ai signé un compromis pour un studio à Paris avec mon fils (50-50% ou 80%-20%). Afin de pouvoir le louer en meublé touristique 120 jours, mon fils pensait l'enregistrer comme résidence principale (il est souvent en déplacement).

    Ma question : Est-ce que nous pourrions enregistrer l'indivision comme bailleur pour le louer comme LMNP 120 jours, même si c'est seulement mon fils que l'utilise comme résidence principale?

    Ensuite, on aurait aimé déduire les frais en réels mais je suppose qu'on pourrait seulement déduire les 120 jrs/365 jrs et peut être seulement à la hauteur de quote-part de mon fils.

    Nous aurons des frais de notaire et des travaux et des meubles à acheter. Je cherche à comprendre si on peut déduire la totalité des frais de notaire et les reporter sur plusieurs années et amortir les travaux et les meubles selon leurs durées d'amortissement ou faut-il limiter la déduction à 120 jours/365 jours ou au pire seulement au quote-part de mon fils.

    Je serais très reconnaissante pour une première orientation et si vous pensez que le projet est faisible nous pourrions peut-être se contacter par mp.

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul mardi, 13 septembre 2022 20:37 Posté par Duvaux Paul

    Réponse à Pierre 4 : lisez ma note, en principe il faut faire une déclaration d'exploitation en indivision, ou faire une SEP.

  • Lien vers le commentaire Pierre4 lundi, 12 septembre 2022 18:28 Posté par Pierre4

    Bonjour,
    Ma conjointe (nous devons nous pacser cette année) a un appartement en LMNP.
    Nous aimerions racheter un bien dans l’idéal toujours en LMNP.
    Est il possible qu’elle conserve son bien en LMNP et d’être deux sur notre nouvelle investissement?

    Ou devons nous obligatoirement créer un sci pour ce nouveau bien ?

    Merci d’avance pour vos retour.
    Pierre

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul lundi, 05 septembre 2022 17:08 Posté par Duvaux Paul

    Réponse à Claudine : selon moi si ce sont bien deux entreprises distinctes, il n'y a pas de problème mais l'administration le refuse parfois si les biens sont détenus en indivision.

  • Lien vers le commentaire claudine lundi, 05 septembre 2022 06:13 Posté par claudine

    Bonjour,
    Dans le cas où chaque conjoint exerce son activité de manière bien distincte : 2 P0i etc. Et s’ils adhèrent tous les deux à un centre de gestion agréé, Ont-ils tous les deux le droit à la réduction d’impôts pour frais de tenu de comptabilité et d’adhésion à un centre agréé ?
    Merci d’avance pour votre réponse

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul mardi, 09 août 2022 15:55 Posté par Duvaux Paul

    Réponse à Bernard : vos questions ne sont pas très claires. Il faudrait faire une étude personnalisée. En tout cas, dans un même foyer fiscal chacun des conjoints peut exercer une activité de location meublée différente. Le problème vient du droit d'amortir quand l'un des conjoints exploite un bien commun. Par ailleurs les règles de définition du LMP et du LMNP sont des seuils s'appliquant en cumulant les chiffres de chacun des conjoint de sorte qu'il est impossible que l'un des conjoints soit LMP et l'autre LMNP.

  • Lien vers le commentaire Bernard mardi, 09 août 2022 10:43 Posté par Bernard

    Bonjour,
    Je fais du LMNP en nom propre et j'ai atteint le seuil de 23k€. Avec ma compagne nous allons nous marier et nous avons en parallèle acquérir un bien pour faire du LMNP (acquisition 50/50). Seulement je voulais savoir s'il était possible de cumuler le LMNP que j'ai en nom propre avec ce nouveau projet en LMNP avec un prévisionnel de 15k€ de CA. Si ce n'est pas possible pouvons nous faire l'acquisition dans le nom de ma compagne et donc cumuler deux LMNP chacun en nom propre sous le même foyer fiscal.
    Merci

Laissez un commentaire