1 Application de l'amende sanctionnant le défaut de déclaration des comptes
Principe généraux
L'article 1649 A du Code général des impôts impose aux personnes physique et à certaines personnes morales domiciliées ou établies en France de déclarer "les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger".
L'article 344 A de l'annexe 3 du CGI précise qu'un compte est réputé avoir été utilisé par un contribuable "dès lors que celui-ci a effectué au moins une opération de crédit ou de débit pendant la période visée par la déclaration, qu'il soit titulaire du compte ou qu'il ait agi par procuration, soit pour lui-même, soit au profit d'une personne ayant la qualité de résident".
Application au cas des structures interposées
Dans l'hypothèse qui nous intéresse, les avoirs étrangers sont détenus par une structure domiciliée à l'étranger.
Or, l'obligation déclarative relative aux comptes bancaires étrangers prévue par l'article 1649 A du Code général des impôts ne concerne que "les personnes physiques, les associations et les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France".
Si l'on s'en tient à une lecture rigoureuse des textes, l'amende sanctionnant le défaut de déclaration des comptes bancaires étrangers ne serait pas applicable lorsque les comptes sont détenus par l'intermédiaire d'une structure constituée à l'étranger.
La nouvelle cellule de régularisation semble avoir admis cette position, tout du moins lorsque le contribuable n'a effectué aucune opération sur les comptes bancaires étrangers (apports ou retraits).
Utilisation des comptes
La question de l'applicabilité de l'amende en cas de structure interposée se pose avec une acuité particulière lorsque le contribuable a effectué des retraits sur un compte détenu par la structure interposée.
En effet, le fait qu'un contribuable effectue des retraits de liquidités ou des virements vers l'un de ses comptes personnels indique nécessairement qu'il bénéficie d'une procuration sur les comptes bancaires de la structure et qu'il a utilisé cette procuration pour son propre compte.
Dès lors l'amende pourrait à mon avis s'appliquer dans cette hypothèse, même si cela n'avait à l'évidence pas été prévu par les rédacteurs de ces textes.
Exemple
Prenons l'exemple d'un contribuable qui a hérité d'un compte en suisse en 2001 qu'il n'a jamais déclaré à l'administration fiscale française.
En 2006, sur les conseils de sa banque, il a constitué une société au Panama qui a repris l'intégralité de son compte suisse.
Il a effectué un seul retrait en 2010.
Du fait de ce retrait, l'administration peut à mon avis lui appliquer l'amende au titre de l'année 2011 (la déclaration du compte doit se faire en même temps que la déclaration des revenus, en N+1 donc).
S'agissant de la Suisse, l'amende s'élèvera à 1 500 €.
2 Amende sanctionnant le non-respect des obligations déclaratives relatives aux trusts
Principes généraux
L'article 1649 AB du Code général des impôts, issu de la loi 2011-900 du 29 juillet 2011, impose deux obligations déclaratives à la charge de l'administrateur des trusts :
- une déclaration "événementielle" relative à la constitution, la modification ou l'extinction du trust ainsi qu'au contenu de ses termes (CGI, art. 1649 AB, al. 1) ;
- une déclaration annuelle de la valeur vénale au 1er janvier, du patrimoine du trust (CGI, art. 1649 AB, al. 2).
Le non-respect de ces obligations déclaratives est sanctionné par une amende de 10 000 € ou, s'il est plus élevé, d'un montant égal à 5 % des biens ou droits placés dans le trust ainsi que des produits qui y sont capitalisés.
Le constituant et les bénéficiaires réputés constituants sont solidairement responsables avec l'administrateur du trust du paiement de cette amende (CGI, art. 1754, V-8).
A priori, cette amende a vocation à s'appliquer pour chaque manquement déclaratif.
Structures concernées
Ces dispositions s'appliquent à toutes les structures qui répondent à la définition du trust codifiée à l'article 792-0 bis, I-1 du Code général des impôts.
Aux termes de cet article, "on entend par trust l'ensemble des relations juridiques créées dans le droit d'un Etat autre que la France par une personne, qui a la qualité de constituant, par acte entre vifs ou à cause de mort, en vue d'y placer des biens ou droits, sous le contrôle d'un administrateur, dans l'intérêt d'un ou plusieurs bénéficiaires ou pour la réalisation d'un objectif déterminé".
Sont donc principalement concernés les trusts anglo-saxons et les fondations suisses.
En revanche, les sociétés n'entrent pas dans le champ d'application de ces dispositions.
Ainsi le contribuable qui a constitué une société au Panama en 2006 pour détenir un compte bancaire suisse et qui n'a effectué aucune opération sur le compte depuis échappe en principe à toutes les amendes sanctionnant un manquement déclaratif.
Cumul avec l'amende sanctionnant le défaut de déclaration des comptes
D'après moi, l'administration ne devrait pas cumuler, pour une même année, l'amende sanctionnant le non-respect des obligations déclaratives relatives aux trusts avec l'amende pour défaut de déclaration des comptes bancaires étrangers.
Cela se comprend car au fond ces amendes sanctionnent un même comportement fautif, à savoir dissimuler ses avoirs à l'étranger.
Il ne s'agit cependant pas d'une position officielle de l'administration, cette solution est donc incertaine et pourrait donner lieu à une application au cas par cas.
Incidence de la circulaire du 21 juin 2013
La circulaire du 21 juin 2013 ne prévoit aucun plafonnement de l'amende sanctionnant le non-respect des obligations déclaratives afférentes aux trusts étrangers.
Toutefois, il a été officiellement demandé à l'administration d'étendre le plafonnement de l'amende pour défaut de déclaration d'un compte bancaire étrangers prévu par la circulaire à l'amende sanctionnant le non-respect des obligations déclaratives spécifiques aux trusts.
Dans cette hypothèse, l'amende serait plafonnée à 1,5 %, pour les contribuables passifs, ou 3 %, pour les contribuables actifs, de la valeur du trust pour chaque manquement déclaratif.
Pour le moment, nous attendons toujours la réponse de l'administration à cette demande.
Exemple
Prenons l'exemple d'un contribuable qui a créé une fondation familiale en Suisse dans laquelle il a placé l'intégralité de ses avoirs étrangers.
L'existence de cette fondation n'a jamais été portée à la connaissance des services fiscaux français.
Or les déclarations suivantes auraient dues être déposées :
- déclaration d'existence (par dérogation, avant le 31 décembre 2012) ;
- déclaration annuelle au titre de l'année 2012 (par dérogation, avant le 30 septembre 2012) ;
- déclaration annuelle au titre de l'année 2013 (avant le 15 juin 2013).
L'administration peut donc appliquer à ce contribuable une amende également à la somme la plus élevée entre 30 000 € ou 15 % de la valeur de la fondation.
3 Rappels d'ISF
Trusts
L'article 885 G ter du Code général des impôts prévoit que les biens ou droits placés dans un trust ainsi que les produits qui y sont capitalisés sont compris dans le patrimoine du constituant (ou, le cas échéant, dans celui du bénéficiaire qui est réputé être un "constituant fiscal").
Cet article, introduit par la loi du 29 juillet 2011, est entré en vigueur le 1er janvier 2012.
Il reprend en l'étendant la solution retenue par la Cour de cassation dans un arrêt du 31 mars 2009 (Com. 31 mars 2009, n° 07-20.219 : RJF 7/09 n° 701).
Il en ressort donc qu'en principe le constituant d'un trust (c'est-à-dire celui qui le met en place) doit le déclarer dans son patrimoine ISF s'il est fiscalement domicilié en France.
Prélèvement spécifique aux trusts
La loi du 29 juillet 2011 a également instauré un prélèvement spécifique codifié à l'article 990 J du Code général des impôts dont l'objectif principal est de sanctionner le défaut de déclaration régulière des avoirs placés dans des trusts.
Ce prélèvement est dû :
- lorsque le constituant, redevable de l'ISF, n'a pas mentionné le trust dans sa déclaration d'ISF ;
- lorsque les obligations déclaratives spécifiques aux trusts (déclarations annuelle et événementielle) n'ont pas été effectuées par l'administrateur et que le constituant n'est pas redevable de l'ISF.
Le taux de ce prélèvement est fixé au tarif le plus élevé du barème de l'ISF, soit 1,50 %.
Son assiette comprend en principe l'ensemble des actifs du trust au 1er janvier de l'année d'imposition lorsque le constituant est fiscalement domicilié en France.
Il s'applique à compter de l'année 2012.
Sociétés
Bien entendu, lorsque les avoirs étrangers sont détenus par une société étrangère interposée, le contribuable doit déclarer la valeur des titres de cette société dans son patrimoine ISF.
Le plus souvent, la valeur de ces titres sera égale à la valeur des avoirs détenus par la société.
Le contribuable peut toutefois appliquer une décote de 5 à 10 % pour tenir compte de l'existence de la société.
Déclarations rectificatives
Le contribuable qui décide de régulariser sa situation devra établir des déclarations d'ISF rectificatives pour chacune des années non prescrites (2007 à 2013).
Les rappels d'ISF correspondants seront assortis d'une majoration en principe égale à 40 % de leurs montants.
En pratique l'administration accorde quasi-systématiquement une réduction de cette majoration afin de tenir compte du caractère spontané de la régularisation.
Si la circulaire du 21 juin 2013 est applicable, cette majoration sera réduite à 15 ou 30 % du montant des rappels selon la situation du contribuable.
Selon moi, il devrait être possible, dans un dossier de régularisation spontanée d'éviter l'application du prélèvement de 1,5 % puisque l'ISF est régularisé spontannément.
4 Rappels d'impôt sur le revenu
Imposition des résultats de la structure
Le plus souvent la structure interposée est personnellement redevable de l'impôt dans le pays dans lequel elle a été constituée.
Tant que les revenus qu'elle dégage ne sont pas distribués, ils ne sont en principe pas imposables en France.
Toutefois, afin de limiter l'évasion fiscale internationale, le législateur français a introduit un dispositif anti-abus codifié à l'article 123 bis du Code général des impôts.
Ce dispositif vise à imposer les revenus capitalisés dans certaines structures situées hors de France et bénéficiant d'un régime fiscal privilégié avec une majoration de 25 %.
Il est applicable lorsque la structure étrangère est assujettie à un impôt dont le montant est inférieur de plus de la moitié à celui que supporterait une société française soumise à l'impôt sur les sociétés.
Imposition des retraits
D'une manière générale, la fraction des retraits effectués par le contribuable qui excèdent le montant des résultats de la structure déjà imposés est imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
Déclarations rectificatives
Le contribuable qui décide de régulariser sa situation devra établir des déclarations de revenus rectificatives pour chaque année non prescrite (à partir de 2006 pour les pays non coopératifs et à partir de 2009 pour les pays coopératifs).
Les rappels d'IR correspondants seront en principe assortis d'une majoration de 40 %.
Toutefois, comme pour l'ISF, cette majoration sera le plus souvent réduite par l'administration.
Nécessité de liquider la structure
En pratique, les personnes qui ont constitué une structure à l'étranger pour gérer leurs fonds et qui entrent dans le champ d'application de l'article 123 bis ont intérêt à la liquider. En effet, le maintien de la structure est très défavorable notamment parce que tout retrait est imposable.
Les services fiscaux admettent en effet, dans le cas de la liquidation, de tenir compte des apports pour limiter l'éventuelle imposition au seul gain net (prise de valeur des fonds après déduction des apports et des revenus déjà taxés).