De plus, les services fiscaux sont en droit de contester la déductibilité des honoraires d'un avocat si le contribuable n'apporte pas la preuve du caractère normal de ces honoraires et notamment du rapport entre les travaux réalisés par l'avocat et l'intérêt de l'entreprise.
C'est ainsi qu'il a été jugé que les factures d'un cabinet d'avocat, qui ne portent pas la mention de leur objet, ne suffisent pas à établir le lien entre les sommes versées à ce cabinet et l'intérêt de l'entreprise (CE 27 octobre 2010 n° 3115056, RJF 2011 n° 67).
Si l'administration n'a pas le droit d'exiger d'avoir la teneur exacte des travaux d'un avocat, elle est en droit de s'assurer que ces travaux concernent bien l'entreprise qui a réglé les honoraires considérés et qu'il s'agit de dépenses normales.
De facto, le droit de contrôle des services fiscaux permet indirectement de violer le principe du secret des correspondances entre l'avocat et son client.
Si une facture précise trop clairement la nature des prestations réalisées par l'avocat, les services fiscaux vont savoir quels étaient les travaux de l'avocat.
Il faut donc trouver un compromis entre le droit de contrôle des services fiscaux sur le caractère normal des charges de l'entreprise, et donc des honoraires des avocats, et la nécessité de préserver au maximum le droit pour le contribuable de garder secret les conseils des avocats.
Il faut faire attention aux intitulés des factures.
Bien sûr dans certains cas ces travaux sont anodins et ne présentent aucun caractère confidentiel, en tout cas vis-à-vis de l'administration fiscale.
Mais parfois, et en particulier pour un avocat fiscaliste, une présentation trop précise des prestations peut être particulièrement dangereuse.
Imaginons un avocat fiscaliste qui indique comme objet de facture : "étude sur le risque de rappel pour abus de droit en raison de la mise en oeuvre d'un schéma d'apport".
Un avocat ne doit pas inciter à la fraude fiscale mais il peut avoir à donner un avis sur les risques de rappel encourus par rapport à des faits déjà commis et sur le coût d'une régularisation.
En pratique, selon moi, l'avocat prudent ne doit pas être trop précis dans la description de ses travaux. Il doit rester général et vague. Pour ma part, l'objet de mes factures est souvent"assistance fiscale".
Il me semble que les services fiscaux n'ont pas de raison de contester la déductibilité d'une facture d'avocat si l'existence des travaux de l'avocat et leur utilité pour la société sont vraisemblables, notamment parce que les honoraires restent d'un montant raisonnable et que les explications données sont vraisemblables.
En matière fiscale, de toute façon, il est rarement possible de prouver de manière absolue l'utilité et surtout la réalité d'une facture de prestation.
Une question délicate est de savoir si les services fiscaux sont en droit d'exiger la production par le contribuable des fiches de diligences qui sont souvent présentées comme des annexes des factures.
Les Barreaux recommandent en général à leur membres de joindre une fiche de diligence à chaque facture, particulièrement lorsque la prestation de l'avocat est facturée au temps passé.
Il s'agit notamment de justifier son temps passé auprès du client.
Mais selon moi la production de ces fiches de diligence en annexe des factures est une erreur.
En effet, ces fiches comportent nécessairement une description précise des travaux réalisés. Si un tiers en prend connaissance, il y a violation du secret professionnel de l'avocat.
Or si une fiche de diligence est l'annexe d'une facture, les services fiscaux ne sont-ils pas en droit de les consulter ?
Il est possible selon moi de faire valoir que ces documents ne sont pas des documents "strictement comptables".
En pratique le comptable de l'entreprise risque de conserver, dans un même classeur de factures, la facture de l'avocat avec sa fiche de diligence agrafée. Et en cas de contrôle fiscal, le vérificateur risque d'avoir ainsi accès aux fiches de diligence car le comptable n'aura pas l'idée d'enlever cette fiche.
Il paraît donc prudent d'envoyer la fiche de diligence dans un courrier à part, en évitant de la présenter comme une annexe de la facture et en indiquant clairement sur le document qu'il s'agit d'un document couvert par le secret professionnel.