M. Vincent Rolland, député. - Je suis toujours embarrassé lorsque l'on change les règles pour des investisseurs, qu'ils soient petits ou gros - en l'espèce, petits -, qui ont acheté un bien après avoir intégré un certain taux d'abattement dans leur plan d'investissement. Cela revient à leur dire de se débrouiller avec les nouvelles règles. Or, certains seront obligés de céder leur bien.
Je préfère ce qui pénalise le moins les investisseurs du passé. Ne faut-il pas appliquer les nouvelles règles au flux et épargner le stock ? Je sais que l'on risquerait de créer une belle usine à gaz, mais ce changement de règles du jeu est embarrassant.
Un plafond à 188 700 euros par an n'avait plus rien à voir avec la location non professionnelle. Aussi, qu'il diminue ne me dérange pas. Mais que le taux change dans des proportions importantes me gêne bien davantage.
Mme Danielle Simonnet, députée. - Je ne comprends pas bien l'intervention de M. Rolland, car le texte a pour objet d'encourager la location à l'année.
Certes, cette proposition de loi n'était pas, au départ, un texte fiscal, mais la fiscalité est à ce point avantageuse qu'elle fait de la location saisonnière un placement très rentable. C'est pourquoi il fallait bien inverser la fiscalité, afin qu'il soit plus avantageux fiscalement de louer à l'année.
Oui, les règles changent pour les investisseurs, mais la mission des députés est bel et bien de modifier les règles quand ils estiment qu'elles ne vont pas dans le bon sens !
M. Inaki Echaniz, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Et cela reste toujours rentable pour les investisseurs de louer sur une courte durée !
Mme Danielle Simonnet, députée. - Toutes ces propositions restent très modérées. Considérant la crise actuelle du logement, alors que 2 000 enfants vivent dans la rue, il est très choquant que le logement ne soit considéré que comme un produit de plus sur l'étal du banquier. Nous devons rompre avec cette logique-là et assumer complètement que nous voulons qu'il soit bien plus avantageux fiscalement de louer sur du long terme.
Mme Dominique Estrosi Sassone, sénateur, présidente. - Ce n'est pas cette proposition de loi qui résoudra la crise du logement, malheureusement. Elle n'apporte qu'une petite pierre à l'édifice.
M. Jean-François Husson, rapporteur pour le Sénat. - Les rapports démontrent que cet article n'aura aucune incidence sur la réalité que Mme Simonnet estime choquante, parce qu'il n'aura pas d'effet de fond sur le phénomène Airbnb. Ceux qui possèdent un certain nombre de biens ont opté pour le régime réel, et ne sont donc pas du tout concernés par cette réforme du régime micro.
Vous allez ennuyer - pour ne pas dire plus - des gens de la classe moyenne, ceux qui nous envoient régulièrement des messages pour réclamer plus de simplicité.
M. Frédéric Falcon, député. - Nous ne sommes pas du tout à l'aise avec la révision de la fiscalité.
Je rejoins les propos du rapporteur Husson : tout cela s'inscrit dans une vision beaucoup plus globale et n'a pas forcément sa place dans cette proposition de loi, même si je comprends l'intention de mes collègues rapporteurs, dont les circonscriptions font face à une véritable complexité en la matière. Nous sommes clairement opposés à la baisse du taux de l'abattement, qui est une hausse de fiscalité pour nos concitoyens. Après les dingueries de création de taxes dont nous avons été témoins ces derniers jours à l'Assemblée nationale, j'ai envie de dire : « Stop ! » Arrêtons d'augmenter la fiscalité sur l'immobilier !
Nous sommes en revanche plutôt d'accord sur la première partie du texte, qui renforce la réglementation.
Chers collègues, je vous alerte : des modèles économiques sont bâtis sur ces dispositifs fiscaux et certains, dans les stations par exemple, verront du jour au lendemain leur fiscalité augmenter. Vous allez alimenter la grogne sociale et la défiance à l'égard de l'impôt.
Nous voterons contre toute modification de la fiscalité en l'état. Nous sommes favorables à une grande réflexion sur la fiscalité immobilière, afin de favoriser la location longue durée, mais les taux doivent être maniés avec une grande attention.
M. Inaki Echaniz, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - On parle de revenus de location bien plus intéressants à la journée, au week-end ou au mois qu'à l'année. Même avec un abattement de 40 %, 30 %, 20 %, voire sans abattement, louer par Airbnb, Booking ou toute autre plateforme restera extrêmement rentable. Celui qui verra son abattement passer de 71 % à 40 % ne verra pas son plan d'investissement remis en question. Changer les draps et préparer des dosettes de café ne justifient pas un taux d'abattement de 50 %.