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Location meublée et parahôtellerie

Démêlez les noeuds de la fiscalité
mercredi, 29 juillet 2015 07:02

La location meublée touristique en ville

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Grâce à Internet, l'hébergement touristique proposé par des particuliers s'est considérablement développé ces dernières années.

Sur la ville de Paris, il y a près de 56 pages pour les offres de location du site de location le plus connu.

Selon moi, l'essentiel de cette activité est réalisée en violation de la réglementation.

Mais il faut reconnaître que cette réglementation n'est pas toujours d'une clarté aveuglante.

Je propose d'évoquer sommairement les principaux éléments de cette réglementation.

 

Les contraintes d'une activité commerciale

Les personnes qui reçoivent des touristes dans leurs locaux exercent le plus souvent une activité de nature commerciale.

En principe, l'activité de location meublée stricto sensu est une activité de nature civile.

Mais si les services fournis avec la location meublée sont significatifs, l'activité doit être considérée comme commerciale.

Or, recevoir des touristes nécessite non seulement de leur fournir un logement meublé, mais de leur proposer généralement en plus certains services comme l'accueil, le linge de maison, le nettoyage des locaux, etc.

En théorie, il devrait être possible d'éviter la qualification d'activité commerciale mais cela suppose de limiter les services, par exemple en précisant que le touriste doit amener ses draps et qu'il doit rendre l'appartement propre à son départ. Cela suppose aussi selon moi de limiter le nombre de touristes accueillis dans l'année. Cela pourrait se concevoir par exemple pour une personne qui fait une seule location à un seul client pendant le mois d'août.

Mais sinon, les personnes qui reçoivent régulièrement des touristes contre une rémunération ont selon moi une activité commerciale, même s'ils le font seulement quelques semaines dans l'année, et même si c'est dans leur résidence principale.

 

Obligation de cotiser au régime social des travailleurs indépendants

Les personnes qui exercent une activité commerciale doivent s'immatriculer au registre du commerce et cotiser au régime social des travailleurs indépendants.

Tel est le cas des personnes qui louent régulièrement un bien à des touristes s'ils fournissent les services hôteliers.

 

Le respect du règlement de copropriété

Quand le bien loué est un appartement, il faut veiller à respecter le règlement de copropriété.

Il faut consulter le règlement de copropriété pour s'assurer qu'il permet expressément l'activité de location touristique.

Si rien de précis n'est mentionné et qu'il est seulement mentionné que l'immeuble est à usage d'habitation, il y a lieu de considérer, selon moi, que l'hébergement touristique rémunéré est interdit, même de façon ponctuel. En effet, il peut provoquer des nuisances non négligeables pour les autres propriétaires.

Cela étant, il a déjà été jugé que si le règlement de copropriété autorise les activités libérales, il ne peut pas interdire la location meublée de courte durée, les inconvénients étant similaires, et en l'absence de nuisance particulière démontrée au cas d'espèce (en ce sens Cass. 3ème chambre civile, 8 juin 2011, n° 10-15.891). Autrement dit, cette question reste discutable et peut s'apprécier au cas par cas par le juge. Le propriétaire mécontent devra sans soute doute prouver les nuisances.

En tout état de cause, le règlement de copropriété ne peut pas valablement s'interpréter comme autorisant une activité illégale, ce qui est le cas de l'hébergement touristique dans un immeuble à usage d'habitation dans les grandes villes (voir ci-après la réglementation en matière d'urbanisme). Toute clause en ce sens serait nulle.

En revanche, il me paraît possible que le règlement de copropriété autorise l'hébergement touristique temporaire quand le bien loué est la résidence principale du loueur, puisque la réglementation en matière d'urbanisme l'autorise expressément sous certaines conditions et dans la mesure où ces conditions sont respectées (ci-après).

Si rien n'est prévu, il est nécessaire de modifier le règlement de copropriété par un vote unanime des copropriétaires.

Les services administratifs parisiens demandent de joindre le règlement de copropriété à la demande de changement d'usage. Ainsi, le règlement de copropriété conditionne l'obtention de cette autorisation (régime de déclaration et autorisation ci-après).

 

Interdiction des sous-locations

Le locataire, souhaitant sous-louer son logement durant ses absences, doit nécessairement demander l'autorisation écrite de son propriétaire, si aucune clause de son contrat de bail ne permet.

En cas de violation de cette obligation, le juge peut prononcer la résiliation du contrat de bail.

 

L'assurance

L'activité d'hébergement touristique comporte des risques.

Un touriste peut mettre le feu à l'appartement et tout l'immeuble peut bruler. Le préjudice peut être considérable.

En principe, les contrats d'assurance ne couvrent pas les conséquences de l'exercice d'une activité illégale, ou même simplement irrégulière.

Par ailleurs, même si l'activité est légale et régulière, il est peu probable que le contrat d'assurance habitation classique vise ce risque particulier.

Il faut donc demander une attestation écrite de son assureur, claire et sans réserve, confirmant la prise en charge des conséquences de cette activité par la compagnie en rappelant que l'attestation n'a aucune valeur selon moi si l'activité est illégale.

 

La réglementation en matière d'urbanisme

Il faut distinguer les deux cas : soit le bien loué est la résidence principale du loueur, soit le bien loué est un autre bien que sa résidence principale.

La notion de résidence principale est définie par renvoi à l'article 2 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi ALUR du 24 mars 2014 :

"La résidence principale est entendue comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l'habitation."

 

La réglementation applicable à la location de meublées d'un bien qui n'est pas la résidence principale du loueur

L'activité de mise en location d'un logement pour l'hébergement touristique entraîne l'obligation de procéder à trois déclarations.

 

1) Le changement de destination

Le fait de louer un logement à usage d'habitation à des touristes constitue un changement de destination de l'immeuble. En effet, le local en question n'est plus destiné à l'habitation, mais à l'exercice d'une activité commerciale (article R 123-9 du code de l'urbanisme).

Il faut déposer une déclaration préalable de changement de destination à la mairie de la commune ou à l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dans lequel est rattachée la commune.

 

2) La demande d'autorisation de changement d'usage

Dans certaines communes, le changement d'usage est soumis à la délivrance d'une autorisation et non pas une déclaration (communes de plus de 200 000 habitants, c'est à dire Paris et la petite couronne, Lyon et Marseille).

En cas de manquement à cette obligation, la sanction est une amende de 25 000 € (art L 651-2 du code de la construction et de l'habitation).

 

La compensation accompagnant la demande d'autorisation de changement d'usage

Lorsque le changement d'usage est soumis à autorisation, le propriétaire du meublé doit proposer un local à usage d'habitation, en compensation, de celui qui fait l'objet du changement d'usage. Les deux locaux doivent être de qualité et surface au moins équivalente. La délivrance de cette autorisation est subordonnée à cette compensation.

De manière simplifiée, 1 m² du local destiné à changer d'usage doit être compensé par 1 m² de local destiné à l'habitation.

A Paris, il s'agit d'une compensation "renforcée", c’est-à-dire que le propriétaire doit compenser 1 m² à l'usage professionnel, par 2 m² à usage d'habitation, et dans le même arrondissement.

La règle de compensation renforcée de Paris ne s'applique pas lorsque le propriétaire transforme les locaux compensés en logements sociaux.

La possibilité de demander des autorisations temporaires de changement d'usage

 

La loi ALUR a intégré un nouvel article L.631-7-1 A au code de la construction et de l'habitation. Il donne la possibilité aux communes d'instaurer un régime d'autorisation temporaire de changement d'usage. Le conseil municipal délibérant doit préciser les critères de délivrance d'une telle autorisation.

A ce jour, Paris n'a pas prévu un tel régime.

3) La déclaration du meublé de tourisme

 

Selon l'article L 324-1-1 du code du tourisme : "toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme, que celui-ci soit classé ou non […], doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé".

Donc, il existe en plus une obligation générale de déclaration à la mairie de toute activité de meublé de tourisme, même en dehors de la réglementation en matière d'urbanisme.

 

La réglementation applicable à la location de meublés si les locaux sont la résidence principale du loueur

Les règles applicables à la location meublée de résidence principale dérogent à certaines règles précitées.

Rappelons que, pour que ce soit la résidence principale du loueur il doit en principe y résider au moins 8 mois. Donc en pratique, la location à des tiers est limitée à 4 mois.

 

L'application des règles de changement de destination et d'usage

Cette location n'est pas soumise à la double autorisation de changement de destination et d'usage de l'immeuble (en ce sens, article L 324- alinéa 2 du code de la construction et de l’habitation).

 

La conformité au règlement de copropriété

En tout état de cause, même si elle respecte la réglementation en matière urbanisme, une telle activité de location reste soumise aux autres contraintes de la réglementation.

Il faut notamment vérifier que l'activité est conforme au règlement de copropriété. Il est vrai que limitée à quelques mois dans l'année, une telle activité provoque nécessairement moins de nuisance qu'une activité annuelle.

 

Les régimes fiscaux applicables aux locations de meublés pour de courtes durées.

 

Le régime fiscal des activités hôtelières

Sur le plan fiscal, il faut distinguer entre le régime fiscal de location meublée qui obéît à des dispositions particulières plutôt favorables et celui du droit commun des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

Le régime de la location meublée suppose de louer un local d'habitation avec des meubles. Mais pour relever de ce régime il faut éviter de fournir des prestations hôtelières significatives.

Si des prestations hôtelières significatives sont fournies, le régime applicable est celui du BIC de droit commun.

Les prestations hôtelières sont l'accueil, le petit déjeuner, le nettoyage des locaux et le linge de maison. Il suffit de fournir, ou même de proposer, 3 prestations sur les 4 pour être considéré comme un hôtelier au sens fiscal.

En pratique, les personnes qui accueillent des touristes fournissent effectivement, ou proposent, les services évoqués et entrent dans le champ d'application du BIC de droit commun.

Selon moi, l'application de la location meublée est possible mais elle suppose de refuser expressément et clairement de fournir par exemple le linge de maison ou le nettoyage des locaux. Cela permet également d'éviter la qualification d'activité commerciale (voir ci-avant) si la location est limitée à un mois dans l'année au même client.

En matière de TVA, la même distinction se retrouve. Ceux qui fournissent les activités hôtelières doivent assujettir leur location à la TVA au taux de 10 %. Ils peuvent éviter toutefois cet assujettissement si les recettes sont inférieures à la franchise de 82 200 €.

 

Le régime fiscal applicable aux locations de meublés constituant des résidences principales

Il existe des exonérations d'impôt sur le revenu en matière de location meublée de la résidence principale mais ces régimes ne peuvent s'appliquer si des prestations hôtelières significatives sont fournies car le régime fiscal applicable n'est pas celui de la location meublée mais celui du BIC de droit commun.

 

Taxe de séjour

Le loueur de meublé de courte durée est redevable de la taxe de séjour lorsqu'elle a été instituée dans la commune.

En principe, il doit la déclarer directement au Trésor Public et doit la verser à celui-ci.

Les intermédiaires (AIRBNB et autres), qui mettent en relation les loueurs et les locataires et qui perçoivent le loyer avant de le reverser au propriétaire, doivent collecter la taxe de séjour et de la reverser annuellement au comptable public assignataire de la commune (loi de finance pour 2015 du 29 décembre 2014 qui modifie l'article L 2333-34 du code général des collectivités territoriales).

 

La contribution économique territoriale

La contribution économique territoriale est due par tous les entreprises et les personnes physiques qui exercent une activité professionnelle non salariée.

Tel est le cas de l'activité hôtelière d'accueil de touristes, même si elle est exercée dans les locaux qui servent également d'habitation du loueur.

Toutefois il existe plusieurs régimes d'exonération qui peuvent s'appliquer, notamment pour les locations limitées dans le temps, la location d'une chambre dans sa résidence principale, et les meublés de tourisme agréés.

 

La taxe d'habitation

Lorsque le local loué constitue la résidence personnelle (principale ou secondaire) du loueur, celui-ci est redevable de la taxe d'habitation, même s'il la loue à des tiers pendant une partie de l'année.

 

La taxe foncière sur les propriétés bâties

En principe, la taxe foncière sur les propriétés bâties est due par le propriétaire.

Certaines collectivités territoriales, dans le cadre de leur fiscalité propre, peuvent prévoir l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés concernant la location meublée de chambres d'hôtes, ou des locaux classés meublés de tourismes situés dans les zones de revitalisation rurale.

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