theme1

Location meublée et parahôtellerie

Démêlez les noeuds de la fiscalité
mercredi, 23 septembre 2015 09:41

Comment payer moins de droits de donation grâce à la location meublée

Évaluer cet élément
(0 Votes)

Les droits de donation et de succession sont très élevés en France dès que le patrimoine à transmettre est élevé.

En ligne directe, après l'application d'un abattement de 100 K€ par enfant et par parent, donc en fait 200 K€ par enfant, il s'applique un barème qui monte très vite au taux de 20 %. Le taux maximum atteint 45 % pour les patrimoines de 1,8 M€ par part.

C'est ainsi par exemple que si deux parents sont propriétaires d'un patrimoine de 2 M€ et s'ils ont deux enfants, les droits dus s'élèvent à 312 K€. Si le patrimoine s'élève à 4 M€, les droits dus s'élèvent à 850 K€.

Autrement dit, en France, les petits patrimoines n'ont rien à craindre mais les patrimoines moyens paient beaucoup de droits.

Il n'y a pas beaucoup de solutions pour réduire les droits de donation et de succession et rester en France. Il faut procéder à des donations échelonnées dans le temps pour profiter de la remise à zéro des compteurs tous les 15 ans, il faut donner avec réserve d'usufruit (mais en perdant l'intérêt de réduire son ISF), il faut utiliser, dans certaines limites, les contrats d'assurance-vie.

La meilleure solution est encore de transmettre une entreprise par donation et de bénéficier ainsi d'un double avantage : une réduction de 50 % si le donateur a moins de 70 ans (ou un abattement similaire grâce à une transmission avec réserve d'usufruit) et une exonération de 75 % grâce au régime du pacte DUTREIL.

La question est donc de savoir si le dispositif du pacte DUTREIL peut être utilisé pour le régime de la location meublée, en vue notamment de transmettre un important patrimoine immobilier sans trop payer de droits.

La réponse est positive selon moi pour les loueurs en meublé professionnels (LMP) au sens de l'ISF, mais les règles sont en partie incertaines.

Pour mettre en place une transmission sécurisée de location meublée avec pacte DUTREIL, il faut respecter certaines conditions.

 

Le régime de la SARL de famille

Tout d'abord, il est préférable d'exercer l'activité sous la forme d'une société de personnes familiale. Le mode juridique le plus adapté est celui de la SARL de famille.

C'est un statut hybride particulier puisque la SARL est une société de capitaux normalement assujettie à l'impôt sur les sociétés. Mais elle peut relever de la transparence fiscale selon le régime dit des sociétés de personnes, sur option, et dans le cas où elle regroupe des associés appartenant à une même famille.

Il faut choisir si possible ce schéma dès le début de l'activité de la location meublée car la mise en société d'une activité individuelle peut générer des coûts fiscaux. Toutefois, la mise en société peut être envisagée à un coût raisonnable et notamment si l'apporteur est exonéré de plus-value.

Dans une SARL de famille, au début, les parents détiennent l'essentiel des titres et les enfants une part symbolique. L'idée est ensuite que les parents donnent une partie importante de leurs titres à leurs enfants en bénéficiant du pacte DUTREIL.

Par ailleurs, si l'activité a été créée sous la forme d'une EURL (SARL avec un seul associé), le schéma s'applique facilement. Après les donations de parts, l'EURL devient une SARL de famille.

La donation peut être faite en plusieurs fois.

Dans certains cas, il est préférable de procéder à une donation avec réserve d'usufruit, notamment pour permettre aux parents de conserver les revenus de l'activité jusqu'à la fin de leur vie. Le fait de conserver une partie importante des revenus de l'activité permet aussi aux parents de conserver le statut de loueur en meublé professionnel.

Mais il est possible également d'envisager une donation en pleine propriété si les parents conservent une grande partie des titres.

 

Les obligations

Le pacte DUTREIL suppose tout d'abord que l'activité soit de nature commerciale.

Pour les sociétés, la doctrine administrative prévoit que les sociétés qui exercent une activité relevant de la catégorie des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC) remplissent nécessairement la condition. Or les loueurs en meublé relèvent de cette catégorie.

Il faut ensuite que les associés souscrivent un engagement collectif de conservation d'une durée minimale de 2 ans et portant sur au moins 34 % des droits. Puis, au moment de la donation, chaque donataire doit s'engager à conserver les titres pendant 4 au moins après l'expiration de l'engagement collectif.

Il faut également que l'un des donataires ou l'un des associés ayant pris l'engagement collectif de conservation exerce dans la société son activité principale pendant la durée de l'engagement collectif et pendant les trois ans qui suivent la donation.

La question est de déterminer comment cette notion d'activité principale doit se comprendre dans le cadre d'une SARL de location meublée. Peut-on considérer qu'il suffit que les parents relèvent du régime des loueurs en meublé professionnel au sens de l'impôt sur la fortune ?

Sur ce point la doctrine administrative prévoit que la notion d'activité principale suppose qu'elle doit permettre de satisfaire aux besoins de l'existence. L'administration précise aussi qu'elle doit être effectivement exercée, ce qui suppose l'accomplissement d'actes précis et de diligences réelles. Enfin l'administration indique que la notion est identique à celle utilisée en matière d'ISF pour le régime des biens professionnels. Le problème est que le régime ISF des parts d'une société de personnes exerçant l'activité de location meublée peut donner lieu à discussion.

Il me semble cependant que si l'un des parents est gérant de la SARL et que le foyer fiscal remplit les conditions pour revendiquer le régime du LMP au sens de l'ISF, il est possible de considérer que la condition d'activité principale est respectée. Il n'est donc pas nécessaire que les enfants aient le statut de LMP.

Il est judicieux de s'assurer que le parent, qui est statutairement le gérant, exerce effectivement ses fonctions. Il doit s'impliquer dans la gestion des locataires. Il faut éviter de passer par une agence immobilière. Idéalement, la location meublée ne se limite pas aux longs séjours et présente un caractère commercial (courts séjours et services hôteliers).

 

La question des plus-values

La donation des parts de la SARL de famille peut donner lieu à l'imposition des plus-values existant sur ces parts.

Selon moi, le régime de plus-value qui s'applique est celui des plus-values professionnelles, lorsque les parents relèvent du régime du LMP.

En pratique, si les parts de la SARL sont données peu après la constitution de la société, il n'y a pas de plus-value.

En revanche, si la société existe depuis longtemps, il est possible qu'il existe une plus-value importante. Mais la plus-value peut dans certains cas être exonérée.

Il faut aussi prendre en compte l'avenir à long terme de la société et le régime d'imposition qui s'appliquera notamment lorsque les enfants liquideront la société pour récupérer les fonds.

 

Le pacte DUTREIL pour un LMP individuel

Il est plus difficile de bénéficier du régime du pacte DUTREIL si l'activité de location meublée est exercée à titre individuel. En pratique, dans cette situation, il est impératif selon moi que l'un des donataires remplisse les conditions du statut de LMP, au sens de l'ISF, après la donation.

Le schéma de la SARL de famille n'impose pas selon moi cette contrainte.

 

Rappel des modalités pratiques conseillées

Les parents créent une SARL de famille avec leurs enfants. La SARL achète des locaux loués meublés. Ils prennent un engagement collectif de conservation. Puis les parents font une donation des parts ou d'une partie des parts, éventuellement avec réserve d'usufruit. Il faut respecter les obligations de conservation. L'un des parents reste gérant de la société et se charge effectivement de gérer la société, notamment en suivant les locataires. Les parents doivent rester LMP au sens de l'ISF au moins 3 ans après la fin de l'engagement collectif.

6 ans après, l'exonération de 75 % des droits de succession est définitivement acquise. Le gain peut être considérable. Dans le cas évoqué d'un patrimoine de 4 M€, les droits dus passent de 850 K€ à 56 K€ !

En pratique, avant de faire le schéma consultez un avocat fiscaliste spécialisé dans la location meublée.

Lu 11531 fois