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Location meublée et parahôtellerie

Démêlez les noeuds de la fiscalité
samedi, 27 janvier 2018 04:16

Le grand flou de l'IFI pour la location meublée

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Le régime IFI des loueurs en meublé devrait être le même que le régime ISF qui leur était applicable.

Sous réserve du respect des mêmes conditions qui s'appliquaient pour l'ISF, les loueurs en meublé devraient être exonérés d'IFI.

Mais il faut faire quelques réserves dues en partie aux imprécisions du texte qui ne paraît pas conforme à l'intention du législateur.

Il faut distinguer l'activité de location meublée exercée sous la forme d'une entreprise individuelle de l'activité de location meublée exercée sous la forme d'une société.

Le régime des loueurs en meublé en entreprise individuelle

Une exonération conditionnelle

S'agissant de la location meublée exercée à titre individuel, elle fait l'objet d'un régime spécifique expressément prévu par la loi (même si en fait le texte est mal rédigé, voir ci-après).

Le texte prévoit qu'elle ne peut être considérée comme étant exonérée au titre d'une activité principale commerciale que si l'exploitant remplit deux conditions.

La première condition est que les recettes de location meublées soient supérieures à 23 000 €.

La deuxième condition est que le revenu net de l'activité de location meublée soit supérieur aux autres revenus professionnels.

Ces deux conditions s'apprécient au niveau du foyer fiscal.

Ce dispositif est presque le même que celui qui s'appliquait avant en matière d'ISF.

La suppression de la condition d'inscription au RCS

Par rapport au régime de l'ISF, une condition a été supprimée, c'est celle de l'obligation de l'immatriculation au registre du commerce.

Cette condition était de toute façon une anomalie technique car il est admis par la doctrine que l'activité de location meublée est de nature civile et qu'elle ne doit pas donner lieu à l'inscription au registre du commerce.

Dans le cadre du régime voisin définissant le loueur en meublé professionnel au titre de l'impôt sur le revenu, cette obligation d'inscription au registre du commerce a été reconnue comme une anomalie par le Conseil d'Etat et à ce titre une QPC est en cours devant le conseil constitutionnel. Il est fort probable que le conseil constitutionnel abroge cette condition le 30 janvier 2018 (décision en attente).

Une coquille dans le texte : seule la condition d'activité commerciale est prise en compte

L'exonération générale des immeubles affectés aux activités professionnelles suppose le respect de deux conditions.

D'une part, il faut remplir une condition sur la nature de l'activité. L'activité doit être industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.

D'autre part, il faut que l'activité soit principale.

L'interprétation littérale du texte aboutit à considérer que les loueurs en meublé qui remplissent certaines conditions sont considérés comme exerçant une activité commerciale au sens de l'exonération générale des activités principales.

Mais le texte ne prévoit pas que l'assimilation porte aussi sur la condition de l'activité principale.

Il s'agit d'une coquille du texte car l'intention du législateur était bien d'instaurer une exonération générale pour les loueurs en meublé (voir en ce sens le texte initial du projet de loi).

Le régime des sociétés exerçant une activité de location meublée

Exclusion de la location meublée de l'exonération générale des immeubles affectés à une activité opérationnelle

Selon moi, les entreprises de location meublée sous la forme de société ne peuvent bénéficier d'une exonération IFI au titre de l'exonération générale des immeubles.

Tout d'abord, bien que ce ne soit pas expressément indiqué, il semble bien que le législateur ait entendu considérer que les immeubles affectés à une activité opérationnelle soient exonérés.

Le terme activité "activité opérationnelle" ne résulte pas du texte, c'est un mot générique qui résume la notion d'activité professionnelle au sens large, c’est-à-dire selon le texte, activité industrielle; commerciale, artisanale, agricole ou libérale. C'est la nature même de l'activité qui est visée et non le rôle de l'exploitant ou de l'associé.

Le nouveau texte prévoit certes que les immeubles affectés aux activités commerciales au sens de l'article 34 et 35 du CGI sont considérées comme exonérés d'IFI. Or la location meublée est visée à l'article 35 du CGI.

Mais la loi prévoit expressément aussi une exception à ce principe : les sociétés dont l'activité consiste à gérer leur patrimoine immobilier ne sont pas considérées comme exerçant une activité commerciale.

Même si ce n'est pas expressément prévu par le texte et même si à ma connaissance les débats préparatoires au vote du texte ne l'explicitent pas, il semble bien que cette réserve vise notamment les activités de location meublée (logement des personnes) ou encore les activités de location de locaux équipés (locaux d'entreprise).

En effet, le texte évoquant l'exonération des immeubles affectés aux activités professionnelles principales exonérées prévoit bien que, par exception au principe d'exclusion générale des activités commerciales, ces deux activités puissent être considérées comme des activités commerciales.

Donc implicitement, la loi entend considérer comme non commerciale au sens de ce texte les activités de location meublée et de location de locaux équipés.

Absence de disposition particulière sur les conditions à remplir dans une société exerçant l'activité de location meublée pour démontrer l'activité principale

La question est de savoir si la location meublée exercée à titre principal dans une société peut être exonérée d'IFI et si oui quelles sont les conditions à remplir.

Le texte de loi admet de manière générale que les sociétés exerçant une activité commerciale sont, de manière générale, considérée comme exerçant une activité commerciale au sens de l'exonération prévue pour les activités professionnelles exercées à titre principal.

Comme il l'a déjà été indiqué, le texte prévoit expressément que, pour ce régime d'exonération des activités exercées à titre principal, les activités de location meublée doivent être considérées comme étant de nature commerciale.

Mais aucun texte ne précise, pour les sociétés de location meublée, quels sont les critères à remplir pour considérer que l'activité des associés de ces sociétés est exercée à titre principal.

Compte tenu du texte dans sa rédaction actuelle, il faut nécessairement conclure, selon moi, que les associés des sociétés exerçant l'activité de location meublée ne peuvent être exonérés d'IFI que s'ils remplissent les conditions de droit commun prévues pour les toutes les sociétés.

Pour les sociétés de personnes, la condition du régime de droit commun est l'exercice de l'activité principale dans la société et pour les sociétés de capitaux, il faut remplir certaines conditions sur le pourcentage de détention du capital et sur l'exercice de fonctions de direction rémunérées.

Une telle position peut paraître discriminatoire s'il est comparé la situation des loueurs en meublé qui exerce en entreprise individuelle avec les loueurs en meublé qui exercent leur activité sous la forme d'une société relevant du régime fiscal des sociétés de personnes comme l'EURL n'ayant pas opté pour l'impôt sur les sociétés ou les SARL ayant opté pour le régime de transparence dit des SARL de famille.

En effet la condition d'activité principale suppose une implication professionnelle à titre principal dans la gestion de l'activité alors que les conditions prévues pour les exploitants individuels se limitent à des considérations objectives d'importance du chiffre d'affaires et des revenus nets.

Mais cette position est conforme à l'ancienne réponse ministérielle Zocchetto : Sén. 24-10-2002 p. 2467 n° 991, non reprise dans Bofip.

Pour les sociétés de capitaux, l'exonération d'IFI supposerait la détention de 25 % des titres (ou que les titres représentent plus de la moitié du patrimoine) et l'exercice d'un mandat de direction dont la rémunération représente plus de la moitié des revenus professionnels du dirigeant. En pratique, ce régime peut être considéré cette fois comme plus favorable que celui de l'exploitant individuel puisqu'aucune implication personnelle n'est exigée, en dehors de l'exercice effectif du mandat.

Théorie alternative

Ma position est discutable. Elle s'appuie sur une rédaction défaillante du texte.

Une autre interprétation est possible. Selon cette interprétation, il faudrait considérer qu'en évoquant l'activité commerciale, le texte légal évoque en fait implicitement également la condition d'activité principale.

Si cette interprétation est retenue, cela permet de réparer l'imprécision du texte en matière d'exonération des entreprises individuelles, ce qui est conforme à l'intention du législateur, mais cela permet également de considérer que tous les titres d'une société de location meublée sont nécessairement exonérés d'IFI, ce qui n'était sûrement pas l'intention du législateur.

Autrement dit, compte tenu de la rédaction défaillante du texte, aucune théorie n'est satisfaisante.

En conclusion, en l'état actuel du texte et dans l'attente des commentaires de l'administration fiscale, il faut rester prudent sur toute interprétation.

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